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Les activités dirigées

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Mars 1969

LE CONGRÈS DE GRENOBLE 1939
LES ACTIVITÉS DIRIGÉES

Célestin FREINET

L'initiative des Activités Dirigées a eu un succès réconfortant.

Je sais bien que l'on peut reprocher à l'administration d'avoir créé sur le papier une discipline scolaire nouvelle pour laquelle les maîtres sont insuffisamment préparés et dont on n'a point prévu l'organisation méthodique qui aurait nécessité locaux, matériel... et crédits.

Nous avons trop souvent affirmé nos conceptions de matérialisme pédagogique pour ne pas nous associer à ces regrets. Certes, si nous avions des locaux et de l'argent, les belles choses que nous pourrions réaliser! Mais nous le disons franchement aussi, dans l'état actuel des choses, nous aurions sérieusement regretté qu'intervienne hâtivement une organisation méthodique et officielle des Activités Dirigées avec sans doute une sanction non moins officielle et scolastique.

Nous sommes, pratiquement, devant un problème « trois possibilités :

— Organisation officielle des Activités Dirigées avec financement officiel, mais comme conséquence, réglementation préalable, bureaucratique de ce qui n'a pas encore acquis forme et technique ;

— Encouragement officiel sans sacrifice pécuniaire, système D actuel ;

— Continuation des sages pratiques traditionnelles qui évitent effectivement le désordre et l'indécision.

Nous sommes à fond pour les Activités Dirigées Système D.

C'est qu'il ne s'agit plus ici d'une pratique scolaire plus ou moins rébarbative et incompréhensible, incapable de soulever aucun enthousiasme et de n'autoriser aucun sacrifice, mais d'un renouvellement profond de notre pédagogie, de la remise en honneur d'activités sociales essentielles, d'une liaison avec la vie et le travail dont administrateurs et parents sentent toutes les possibilités dynamiques. Et des milliers d'instituteurs qui se mouraient d'ennui et de routine à ressasser les mêmes devoirs et les mêmes leçons entre les quatre murs de l'école, se sentent revivre soudain à la pensée de pouvoir donner libre cours à quelque tendance refoulée dont l'épanouissement aurait illuminé leur apostolat : l'un s'intéresse aux archives, l'autre aux vieux meubles, d'autres à l'histoire, ài la géographie, aux sciences, au cinéma, à la nature, aux travaux des champs... Ces activités étaient à ce jour complètement séparées de l'école qui n'en profitait point ; c'était une sorte de travail de contrebande, désespérant et sans écho.

Il y aura désormais du nouveau dans nos écoles. A certaines heures, au moins il y aura de l'enthousiasme et de la joie.

Comment ne pas nous en féliciter ?

 

no 6

l'Educateur, 31 mars 193g.

2 L'ÉDUCATEUR