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Revue en ligne CréAtions n°209 "Identité remarquable"
annoncée dans le Nouvel Éducateur n°209 - Publication en septembre 2012

Classe de Petite Section, École maternelle du Chat perché, Cergy (Val d'Oise) - Enseignante : Agnès Joyeux

 

Mémoire de gitans

Présente à la biennale de Venise en 2007, l'œuvre de Gabi Jimenez déclenche plusieurs lectures.
Pour les enfants de l'école maternelle, elle met en scène de façon très colorée la vie quotidienne des gitans : les caravanes, multiples, multicolores, en un long défilé ou bien regroupées en cercle, les personnes qui y vivent : femmes qui font la lessive, hommes qui jouent de la guitare, enfants qui jouent, multiples portraits aux lignes fortes, aux regards directs, etc.

A y regarder de plus près certains détails interpellent le spectateur et dénoncent le rejet des « gens du voyage », le racisme au quotidien à l'encontre des Tsiganes, romanichels et autres « voleurs de poule » : des aires toujours plus éloignées, toujours trop petites, mal équipées, des contrôles toujours plus pointilleux, etc.

Enfin, certaines installations ou sculptures de Gabi, d'une grande force voire d'une grande violence interdisent l'oubli de l'insupportable comme la déportation des gitans dans un passé pas si ancien.

Artiste singulier, Gabi Jimenez est engagé au coté de plusieurs associations de défense des gitans et gens du voyage, coopère avec des musiciens (Ogres de Barback), des cinéastes (Tony Gatlif) et d'autres créateurs.

Son action est à la fois ancrée localement, notamment auprès des élèves des établissements scolaires de Cergy dans le Val d'Oise, démultipliée et d'un retentissement beaucoup plus large.

A l'espace du Carreau de Cergy, Gabi Jimenez expose « Mémoire de gitan » et invite les classes à découvrir ses toiles et installations. Aux œuvres de Gabi s'ajoutent des objets de la vie quotidienne gitane, des robes, des textes comme la légende du hérisson, des photos de Djando Renhart, etc.

Gabi est là et échange avec les enfants, faisant remarquer aux plus jeunes l'expression des visages, la présence de monuments locaux sur ses toiles (la tour Eiffel, la préfecture du Val d'Oise, etc.) racontant aux plus grands de l'école élémentaire les préjugés subis et aux collégiens la déportation programmée au cours de l' Histoire.

Conte tsigane : la princesse et le hérisson

Un roi tsigane alla se promener dans une épaisse forêt. Il s’y promena si bien qu’il s’y perdit. Rien à faire pour retrouver son chemin. Et voilà le roi affolé qui crie, se désespère ; il se croit déjà mort, de froid, de faim, ou bien dévoré la nuit par des bêtes féroces..
Tout à coup, une petite voix se fit entendre, celle d’un hérisson posé près d’un taillis.
- Grand roi, si tu le veux, je te montre ta route. Mais à une condition...
- Laquelle hérisson, laquelle ? Je suis prêt à tout ! Tu auras autant d’or que tu le désires…
- Je ne veux pas d’or, grand roi, mais seulement la main de ta fille.
- Quoi ?
Le roi eut beau s’indigner, le hérisson n’en voulut pas démordre. Et le roi avait tellement peur qu’il accepta finalement le marché :
- Je te donne ma parole d’honneur : tu épouseras la princesse.

Le hérisson se mit en marche ; l’un guidant l’autre, ils arrivèrent tous les deux au château.
Là, jugez de la scène : la fille du roi qui crie tout ce qu’elle sait, qu’elle n’épousera pas un hérisson, il n’en est pas question ; le roi qui réplique en disant qu’il a promis et qu’il n’est pas question non plus de revenir sur sa parole, etc. etc.

Après cette dispute, la princesse fut tout de même obligée d’obéir aux ordres de son père. Ce dernier organisa les noces sur-le-champ, les célébra lui-même, offrant aux jeunes mariés, et le pain et le sel.
Tous les Tsiganes invités, une fois leur première surprise passée, mangèrent, et burent, tout en riant et en chantant, félicitant les nouveaux époux. Des violons menèrent le bal… Seule la fille du roi pleurait, pleurait, pleurait…
Mais voilà tout à coup, ô miracle, qu’aux douze coups de minuit, le hérisson disparut, s’évanouit, et qu’à sa place surgit un beau jeune homme !
C’était le prince d’un pays voisin. Il expliqua qu’une fée mauvaise lui avait jeté un sort : il resterait hérisson jusqu’au moment où une princesse accepterait de le prendre pour époux !
La princesse sécha ses larmes, son visage s’illumina de joie, la fête redoubla d’ardeur.
Tout est bien qui finit bien.

Depuis ce temps là, si certaines jeunes Tsiganes continuent de manger du hérisson, parce que c’est bon, d’autres refusent, au contraire, car elles ne veulent pas prendre le risque de dévorer leur prince charmant.

In Mille ans de contes Tsiganes, Bertrand Solet, Éditions Milan


                  

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