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5ème PARTIE * UNE EXPERIENCE EN INSTITUT MEDICO-PEDAGOGIQUE par Lucette MAGNE

Dans :  Techniques pédagogiques › organisation de la classe › 
Avril 1967

5ème PARTIE

*

UNE EXPERIENCE

EN INSTITUT MEDICO-PEDAGOGIQUE

par Lucette MAGNE
I.M.P. Bourneville, 87 – Limoges

1. CONDITIONS NÉCESSAIRES

2. NOTRE EXPÉRIENCE

3. ROLE DE LA FORMATION DES ÉDUCATEURS

I ‑ CONDITIONS NECESSAIRES

A) L'EDUCATEUR

1°. La pratique de l'autogestion exige un certain type d'éducateur

Certes, nous pensons que l'éducateur idéal n'existe pas. Cependant nous croyons qu'il doit posséder ‑ ou essayer d'acquérir les « vertus coopératives » suivantes :

- être généreux et disponible de façon permanente ;
- avoir une valeur morale, intellectuelle, technique, pédagogique certaine et sans cesse en voie de perfectionnement ;
- avoir une conception démocratique de la vie des sociétés futures ;
- savoir s'intégrer dans une unité de conception de l'homme et de l'éducation au sein d'un Etablissement ;
- savoir se retirer de l'équipe si ses conceptions ne sont pas celles de l'ensemble des membres de ce groupe ;
- savoir prendre des responsabilités ;
- savoir collaborer à tous les niveaux : parents, enfants, etc ;
- savoir se passer de directives, d'ordres hiérarchiques, tout en s'accommodant de ceux qui sont indispensables ;
- savoir « écouter » les autres, enfants ou adultes ;
- savoir aussi se taire, s'éloigner à certains moments ;
- savoir s'intégrer aux activités des enfants, en « participant », en aidant les uns et les autres ;
- savoir « communiquer » avec les enfants et les adultes ; comprendre les autres ;- avoir un jugement sûr, mais jamais définitif ;
- laisser toujours aux enfants une possibilité de se reprendre, de faire mieux ;
- écarter toute forme de paternalisme incompatible avec un climat d'auto-organisation. « L'adulte ne doit s'intéresser à l'enfant que pour lui-même, et non pour lui imposer ses propres intérêts » (P. Yvin) ;
- être entraîné au travail collectif ;
- être décidé à faire oeuvre commune avec l'ensemble des éducateurs ;
- être équilibré ;
- être réaliste (vue sur le monde environnant) ;
- respecter l'enfant dans sa personnalité ;
- aimer l'enfant (amour oblatif et non captatif) (P. Vernet).

2°. L'organisation en autogestion de la classe exige une nouvelle conception du rôle de l'adulte

La situation de l'adulte, dans le cadre d'une telle pédagogie, est tout autre que celle de l'enseignant qui dispense son savoir.

Le maître a sa place au sein de l'équipe au même titre que chacun des membres qui la composent.

Il a cependant la « responsabilité officielle » du groupe, et il est de son devoir de veiller à ce que soient bien appliquées les décisions de celui-ci et que soit entrepris un travail réellement efficace. Il est toujours disponible.

Dans la mesure où son rôle est bienveillant et aidant, il s'intègre parfaitement à la bonne coopération du groupe.

B) LES TECHNIQUES

A l'Ecole Moderne, nous pensons que l'attitude du maître ne peut, à elle seule, transformer les relations d'élève à élève et d'élèves à maître. Le climat d'une classe est lié à l'organisation du travail et à l'utilisation de nouveaux outils de travail, de techniques nouvelles qui, lorsqu'elles ne sont pas imposées, sont vivifiantes et enrichissantes pour l'individu et la collectivité.

Nous citerons des techniques qui aident adulte et enfants à créer le climat d'autogestion.

1°. Les techniques d'expression libre

Par le texte libre, par le dessin libre, par la parole comme par le chant, l'enfant raconte, exprime ce qu'il ressent. Il crée, il invente. Au cours de ces activités d'expression libre, pouvant être étendues à l'enquête, à la conférence, l'enfant se soustrait à la domination et à la pensée de l'adulte ; il devient, avec l'aide de ce dernier, maître de son activité, il autogère son activité.

2°. Le journal scolaire de classe ou d'établissement

A travers cette activité, qui doit être gérée par les enfants, se créent les responsabilités.

Le journal scolaire est un travail d'équipe qui prépare pratiquement à la coopération sociale. L'échange des journaux permet d'établir des rapports directs entre des enfants, de les familiariser avec d'autres modes de vie, et les aide à mieux comprendre les autres, par-delà les frontières, ou seulement les départements.

3°. La correspondance interscolaire

Je ne redirai pas ici, après Yvin, l'intérêt de cette technique. Sur la trame de la correspondance se tisse, jour par jour, riche et authentique, le Livre de vie de la classe, du groupe ou de l'établissement.

Ci-après un exemple des échanges ainsi réalisés entre la classe IMP Bourneville, Limoges (filles) et la classe de perfectionnement de Decazeville (garçons) :

Envoi du 3/11/1967 de Bourneville à Decazeville

-          Une page : « Nous avons retenu dans vos dernières lettres… »
-          Une lettre de la maîtresse ;
-          Quinze lettres individuelles ;
-          Un panneau: dessin et collage (collectif) ;
-          Nos textes :   L'hélicoptère
   Oradour-sur-glane
   Cueillette des châtaignes
   Une invitation ;
-          Notre journal : GERBE BAUDE n°1 – 1967 ;
-          Nos réponses aux questions posées par les correspondants ;
-          Nos questions (la pétanque, les châtaignes...) ;
-          Une bande enregistrée au magnétophone : A propos de la Découverte de Decazeville : lecture d'un texte ; questions posées aux correspondants sur cette « mine à ciel ouvert ».

Un exemple de ce que nous avons reçu : (le 17/11/67)

-          Une page : « Nous avons retenu dans vos lettres »
-          Un journal AU PAYS DES MINEURS ;
-          Réponses à nos questions (la pétanque; les châtaignes ;
-          Photos et diapositives couleurs : La Découverte de Decazeville (reportage‑enquête) ;
-          Bande de magnétophone explicative
-          La lettre du maître ;
-          Quinze lettres individuelles ;
-          Textes libres :   La Pêche ;
Notre Panorama ;
Les Champignons.

4°. La technique de l'enquête, l'utilisation de la T,V. scolaire

Elles modifient la situation du maître en lui donnant une autre fonction que celle d'enseignant.

5°. Les bandes programmées

Leur utilisation permet à l'enfant de se libérer davantage du maître. En lui permettant de se diriger lui-même, de se contrôler, l'éducateur donne à l'enfant un sentiment plus grand de sa responsabilité.

6°. Les activités physiques, le plein air contribuent également à mieux souder la communauté maître-enfants.

Je ne peux donner en détail les caractéristiques de techniques qui peuvent aider ou favoriser le fonctionnement démocratique de l'institution. L'essentiel est de proposer aux enfants le plus large éventail d'activités entre lesquelles ils pourront choisir.

Il faut encore signaler :

-          l'emploi de plans individuels, de plannings collectifs, de brevets, pour l'organisation du travail libre et le contrôle de ce travail ;
-          l'utilisation du journal de Coopé (autre forme du journal mural) ;
-          les ateliers de travail : de calcul, de travail manuel, d'expérimentation scientifique ;
-          l'utilisation des moyens audiovisuels : photos, bandes magnétiques, films, diapositives, etc. ;
-          la pratique de techniques d'expression corporelle (danse, théâtre, marionnettes...).

Certes, l'organisation de toute communauté ne se fait pas en un jour, surtout lorsqu'il s'agit d'enfants instables ou débiles, perturbés ou agressifs, ou présentant toute autre sorte de troubles.

Ce n'est pas l'institution hâtive d'un bureau d'enfants, l'introduction dans la vie de la communauté de quelques techniques dites « coopératives » (conseil de classe par ex.) qui permettront le départ de cette forme nouvelle de vie.

Mais c'est avec l'aide de ces techniques que s'installera un nouveau « climat de vie » et que, par la création de responsabilités nouvelles et variées, naîtra chez l'enfant cette prise de conscience de la liberté dans le travail et l'éducation.

C) L'ENFANT

Un système d'organisation du travail n'est démocratique que dans la mesure où activités et techniques sont renouvelées, où l'enfant a son mot à dire quant à leur utilisation.

Chaque membre de la communauté doit avoir la possibilité de conserver sa liberté d'action au sein du groupe. Chacun doit pouvoir trouver sa voie dans cette vie collective : les uns s'affirment mieux dans un travail de groupe qui les valorise, les autres par un travail individuel. Chacun doit pouvoir s'épanouir selon ses goûts, ses possibilités, ses potentialités.

D) LA CLASSE FREINET EN AUTOGESTION

1°. Elle ne s'accommode pas d'une méthode traditionnelle de travail basée sur le manuel, le devoir, la leçon, ou de toute méthode basée uniquement sur le travail individuel et incompatible avec toute forme de collaboration communautaire.

2°. Elle ne se confond pas avec le laisser-aller. S'il n'y a pas une organisation rationnelle des activités de la communauté, on tombe inévitablement dans le désordre, la nervosité, et donc l'inefficacité.

« Si vous êtes seul à rouler sur une route privée, vous n'avez pas besoin de règlement, et vous trouveriez ridicule le fait d'appliquer ici le code de la route sous prétexte que ce code existe ailleurs. Mais dès que la circulation deviendra un peu plus complexe, alors oui le règlement s'imposera » (Dossier pédagogique I.C.E.M. 34-35).

Aussi, progressivement :

-          des règles de vie sont élaborées en commun, donc senties et approuvées, et respectées par tous. En effet, le matériel collectif appartient à tous. Il permet un travail d'équipe. Cela suppose une entente, une organisation, un règlement ;
-          l'éducateur doit supprimer, de façon sûre et rapide, tout climat d'irresponsabilité et de bagarre, opposé à l'esprit de collaboration. Il se peut qu'au départ les enfants n'aient aucun sens coopératif ; les rivalités de clans hostiles, les jalousies individuelles, des rapports sociaux basés sur la loi du plus fort, des troubles du comportement et de la conduite risquent de constituer un obstacle sérieux. C'est justement là que l'éducateur doit intervenir pour remettre de l'ordre, en agissant constamment sur l'acquisition de l'esprit de coopération ;
-          l'éducateur sait réduire au minimum les sanctions négatives qu'elles demeurent un pis-aller et qu'elles soient distribuées par le conseil de coopérative et non par un coopérateur, surtout si c'est le maître. Les sanctions s'opposent, par leur définition même, à toute acquisition du goût du travail, à tout effort personnel d'amélioration.

« Le propre des enfants difficiles ou retardés c'est qu'ils ne veulent pas, ou ne peuvent pas obéir, La sanction peut, dans certains cas, avec des élèves normaux, produire un effet, ne serait-ce que passager. Avec des enfants difficiles, toute punition manque totalement son but et ne fait qu'aggraver le mal, Ces enfants sont rebelles au dressage. » (C. Freinet)

3°. Elle s'oppose à toute forme bureaucratique d'organisation. Il faut laisser les enfants s'essayer à cette forme nouvelle de vie par tentatives et tâtonnements.

L'organisation ne peut être le fait d'un bureau plus ou moins autoritaire, plus ou moins actif, se substituant parfois à l'autorité ancienne du maître, elle est l’œuvre de tous.

Elle ne peut admettre le « caporalisme » dans la technique des responsabilités. Pour cela, il faut multiplier les postes de manière que chacun ait les deux possibilités : commander et obéir.

4°. L'autogestion en établissement suppose une unité de vues, des aspirations communes. En effet, les enfants ressentent inévitablement toutes les failles dans les relations entre adultes qui vivent avec eux.

Il faut un lien entre les adultes d'une communauté, pour que soit fort l'esprit de coopération ; et ce lien ne peut être qu'une volonté commune d'aboutir à une éducation totale des enfants, et ceci dans la perspective de la formation civique, intellectuelle, morale, psychologique, sociale, économique, démocratique de l'homme de demain, associé aux décisions à prendre quelles qu'elles puissent être.

2 ‑ NOTRE EXPERIENCE

A) PRESENTATION DE L'EXPERIENCE

Il s'agit ici d'une expérience tentée en I.M.P. pour enfants déficients intellectuels et présentant des troubles associés. Nous relaterons les étapes successives de cette tentative et nous donnerons quelques exemples pratiques des structures et de la vie coopérative. L'expérience porte ici sur 6 années.

1°. Première et deuxième année

Constitution d'une coopérative de classe (grandes filles). Pas de cotisations ‑ pas de bureau constitué ‑ pas de statuts. Mais achat de matériel permettant la réalisation d'un journal (imprimerie + limographe).

Utilisation des fichiers autocorrectifs. Demande de correspondants.

BILAN                   de jolies réalisations ;
                              du travail certain ;
                              un enthousiasme suscité chez les enfants ;
                              éveil de l'intérêt des adultes environnants.

2°. Troisième année

Choix de responsables dès le début de l'année dans cette même classe. Une autre classe de moyens coopère. Des échanges se font de la classe des grandes à celle des moyens. Les grandes initient les moyens au travail d'enquête, à la peinture, à la confection d'albums, au travail d'imprimerie.

Deux pages du journal des grandes sont consacrées aux textes des moyens. Les jeux, les sorties communes, les comptes rendus collectifs se multiplient entre ces classes.

En correspondance, on commence les échanges de bandes magnétiques.

Le directeur de l'Etablissement s'intéresse à l'aspect coopératif et aux réalisations des enfants. On tente de créer une Coopérative d'Etablissement ; mais elle restera trop formelle. Les réunions de responsables sont encore trop artificielles.

3°. Quatrième année

La classe des grandes filles échange ses travaux avec celle des grands garçons ils sont conquis, ainsi que leur maîtresse, à notre forme de travail ils achètent des Bibliothèque de Travail, ils font un journal, avec nous ils viennent visiter une laiterie.

Ils réalisent un album, et nous de même ; ces albums sont envoyés à un concours de l'O.C.C.E. et gagnent un prix.

Dans la maison, adultes et enfants considèrent cette activité très constructive et intéressante dans ces classes de grands. Les moyens continuent à nous suivre et font seuls leur journal.

Une classe de petits, au 3e trimestre, démarre le texte libre, le dessin libre.

Les réunions de maîtres ou d'enfants au niveau de la Maison sont un peu moins rigides, mais encore peu satisfaisantes.

Un travail intéressant est entrepris au niveau de l'internat. Les grandes filles ont la possibilité, avec leurs éducatrices, de faire le marché en dehors des heures de classe, pour l'enseignement ménager.

La fête scolaire de Noël est préparée au niveau du groupe avec les enfants, les éducatrices, la maîtresse.

On invite les éducatrices à déguster les plats préparés en enseignement ménager.

Les enfants peuvent continuer en internat ou en classe un travail commencé (correspondance, peinture, imprimerie). On a confiance.

4°. Cinquième année

1)      Au niveau de la classe : Un conseil de classe ‑ un statut des responsables élues ‑une organisation plus structurée (réunions plus nombreuses) ‑ tout ce travail est coopérativement organisé.

2)      Au niveau de l'Etablissement

-          4 journaux édités ;
-          3 réunions par des responsables de groupes, d'internat et de classes ;
-          participation d'une maîtresse au conseil d'administration des coopératives du département ;
-          activité très réelle, mais encore jugée insuffisante par l'ensemble des coopérateurs (lourdeurs administratives en cause, et manque de temps...).

5°. Sixième année

-          5 journaux édités
-          voyage-échange avec les correspondants (2 classes de l’I.M.P. reçoivent deux classes de Decazeville) ;
-          activité de plus en plus riche et prenante ;
-          la principale difficulté, s'opposant à cet enthousiasme réel des enfants et de certains adultes de la maison, c'est l'inertie, l'incompréhension de l'ensemble des adultes. Mais les enfants ne désespèrent pas ; ils sont courageux, ils nous donnent l'exemple, et avec eux tous les espoirs sont permis : la Coopérative progresse ; elle vivra

B) A PROPOS DU JOURNAL DE COOPERARIVE

Il circule dans la classe et est à la disposition de tous ; il remplace le journal murai qu'on trouve dans certaines classes. Il a pour but de préparer de façon permanente les réunions du conseil de coopérative (qui seront alimentées de cette manière).

Il permet une fois de plus aux enfants de s'exprimer en toute liberté. Il reflète tous les aspects de la vie de la petite communauté, dont il faut discuter ensemble.

Voici ce qu'en pensait Freinet :

« Nous, adultes, quand nous affrontons une discussion, nous avons le soin de rédiger au préalable, sur un aide-mémoire, les points a discuter.
« Sans le journal de coopérative, les enfants n'auront évidemment rien à discuter, sinon ce qui s'est passé quelques instants auparavant.
« Avec le journal, il y en aura toujours trop...
« En aucun cas, le journal de coopérative et sa lecture en réunion de la coopérative ne sont /à pour juger et sanctionner. Il s'agit plutôt de chercher ensemble les solutions techniques et affectives qui peuvent corriger les erreurs intervenues dans la vie de la communauté.
« Ni juge, ni règle, ni loi. Il faut que les enfants prennent conscience des problèmes qui se posent à eux. »

COMPTE RENDU D'UNE REUNION DU CONSEIL DE COOPERATIVE D'UNE CLASSE

Conseil du 27 avril 1968.

Présidente : Paulette, 14 ans, groupe des grandes, Q.I. 80 (B.S.)

1°. La présidente ouvre la séance.
2°. Elle lit les critiques, les remarques, les questions ou suggestions qui ont été inscrites sur le Journal de la classe. (Dans certaines classes, ce journal est mural ; ici, en raison d'un manque de place pour l'affichage, nous avons préféré un « journal tournant »).
3°. Chaque sujet est repris un à un, avec essai de trouver des solutions quand c'est nécessaire, ou bien dans le but de porter à la connaissance de tous certaines réflexions méritant la considération de toute la communauté.
4°. Première partie : JE CRITIQUE

Remarques

Propositions

‑ Les tableaux ne sont pas effacés quand on en a besoin

- A la cuisine, les torchons ne sont pas assez souvent changés ; il faudrait les changer tous les lundis.

 

- Les fiches sont mal classées dans le fichier des problèmes.

 

 

 

 

 

 

- Notre journal n'est pas aussi propre que celui des correspondants de Decazeville.

Solutions et Décisions

Annie, responsable de ce travail, reconnaît qu'elle oublie souvent le soir de faire son travail. Elle assure qu'elle va s'en occuper plus sérieusement.
‑ Béatrice et Evelyne pensent que la lingère sera d'accord pour renouveler plus souvent ces torchons. Elles vont aller la trouver pour s'entendre avec elle.
‑ On pourrait aussi demander que soit placé un porte­torchons, pour éviter que les torchons ne tombent et ne se salissent (ils n'ont pas de place propre).
‑ Thérèse, responsable de ce travail, demande aux deux camarades qui ont mis du désordre, de bien vouloir l'aider à reclasser ces fiches.
‑ La maîtresse fait ici remarquer que ce travail n'est pas faisable par la responsable seule et que c'est chacun d'entre nous qui aidera à maintenir un ordre parfait dans les fichiers ou les documents ou la bibliothèque, ceci en respectant la classification prévue.

Chacune est responsable des fiches ou des documents :
‑ quand elle les sort
‑ quand on les utilise
‑ quand on les replace.
‑ Anne‑Marie, responsable des journaux, dit que nous pourrions mettre moins d'encre pour imprimer.

‑ Chantal pense que nous ne laissons pas sécher assez
longtemps nos feuilles imprimées.
‑ Marie‑Josée dit que nous en recevons de plus sales que le nôtre.
‑ Paulette affirme qu'il ne faut pas copier les plus sales, mais les plus beaux.
‑ Nous allons donc y veiller.

Deuxième partie : JE FELICITE

‑ Béatrice range très bien les caractères d'imprimerie dans les casses.

‑ Chantal Gauthier a réussi à grimper à la corde, C'est formidable.

‑ Yvette a entrepris de changer tout le classement des bibliothèques de travail; elle y passe beaucoup de temps.

‑ Isabelle et son équipe ont fait le plus beau grand dessin pour décorer la classe: La Mer,

‑ Béatrice précise qu'elle n'est pas toute seule pour faire ce travail. Heureusement! ajoute Thérèse.
‑ Je croyais que je n'y arriverais jamais, dit Chantal.
‑ Oui, mais il y a deux ans que tu essaies, et tu vois, tu y arrives maintenant ! lui dit Anne-Marie.
‑ On pourrait bien l'aider, si elle veut. C'est d'accord ! dit Yvette.
On s'entendra avec elle pour continuer, comme elle a commencé ! dit Béatrice.
‑ Toute la classe reconnaît que ce panneau est bien joli, et on va le fixer au mur.
‑ Il fera très gai, avec ses jolies couleurs, sur ce mur du fond de la classe, affirme Paulette.
‑ C'est bien réussi, ajoute la maîtresse.

Troisième partie: JE PROPOSE

‑ Il faut remettre à jour le panneau d'affichage de nos textes libres.

 

 

 

 

 

‑ Je propose qu'on prépare l'album sur la visite de la Laiterie des Fayes avec les garçons de la grande classe, puisqu'on fait la visite avec eux.

 

‑ Renée En effet, il manque les deux derniers. ‑Yvette Je veux bien m'en occuper.
‑ Paulette : On pourrait composer chacune des paragraphes plus courts et se remplacer au fur et à mesure que l'une a flni.
‑ Anne-Marie : Je préfère être seule pour composer tout un paragraphe. Quand je suis lancée, ça va plus vite.
‑ Nicole : Moi je ne vais pas vite ; si on était à deux, ça irait mieux.
‑ Paulette : Si vous êtes d'accord, on peut laisser composer des grands morceaux à celles qui vont vite, comme Anne-Marie, et on remplacera celles qui vont plus lentement, quand elles auront fait deux lignes.
‑ La maîtresse : Mais alors celles qui vont lentement n'apprendront pas beaucoup à travailler mieux !
‑ Toutes : C'est vrai ! (C'est ici une question difficile : on y repensera).
‑ Yvette et Chantai iront voir les grands et leur maîtresse pour savoir si c'est possible ‑ On pourrait aussi se partager le travail (Paulette) ; eux prendraient des photos, et nous, par exemple, on enregistrerait au magnétophone.
‑ La maîtresse (avec toute la classe) : Il faudra réunir des responsables des deux classes pour préparer cette visite-enquête.

Une telle institution coopérative permet :

-          d'établir des contacts directs et libres entre tous les membres de la communauté ;
-          de poursuivre des échanges qui sont une source d'enrichissement mutuel, ainsi qu'un moyen nouveau de développer l'esprit de fraternité ;
-          de transformer nos maisons en familles accueillantes où enfants et adultes aiment vivre dans un désir collectif d'amélioration intellectuelle, morale et civique ;
-          à tous les membres de la communauté, d'avoir une action sur la gestion et le fonctionnement administratif ou financier des établissements.

A ce sujet, je préfère parler de co-gestion non-directive, et j'en donne la définition suivante :

La co-gestion non-directive en pédagogie institutionnelle, permet d'enthousiasmer enfants et adultes vivant dans un même établissement, pour des activités correspondant à leurs besoins et visant à la formation et à l'évolution de l'être humain tout entier, et par là-même de la société de demain.

Cette co-gestion non-directive ne peut se ramener à l'utilisation de quelques techniques libératrices, ni à quelques formules de vie nées des conseils de coopérative ; mais elle doit s'exercer à tous moments de la vie dans l'établissement, à tous les niveaux et dans chaque activité.

3 ‑ ROLE DE LA FORMATION DES EDUCATEURS

La formation des éducateurs doit jouer un rôle essentiel pour la pratique d'une pédagogie de l'autogestion. J'estime qu'elle doit répondre aux critères ci-après :

1°. Une pédagogie de l'autogestion ne s'enseigne pas, elle se vit

Il est essentiel que les éducateurs, stagiaires ou élèves-maîtres puissent vivre des expériences d'autogestion par un travail effectif dans les classes ; qu'ils puissent vivre l'esprit de cette pédagogie dans les stages de formation :

-          où l'on développera l'habitude et le goût du travail en commun et de la discussion ;
-          où l'on apprendra à écouter avec sympathie les idées énoncées par d'autres ;
-          où l'on bannira toutes possibilités de briller aux dépens des autres, de les écraser pour s'imposer.

2°. Former la personnalité des éducateurs

Plutôt que de faire acquérir aux futurs éducateurs une somme de connaissances livresques, scolaires ou autres, il convient de mettre l'accent sur la formation de la personnalité de l'éducateur.

L'éducateur doit être formé à l'animation et à l'organisation. Dès l'école normale, les enseignants seront entraînés à des travaux d'équipe, à des techniques de groupe. Une place importante sera faite à la dynamique de groupe.

3°. Donner aux éducateurs une large information

Il est nécessaire que l'éducateur ait une bonne connaissance de la psychologie des enfants et des adolescents, et du développement intellectuel et effectif de leur personnalité.

Toute formation doit permettre à l'éducateur de maîtriser les techniques pédagogiques : techniques d'expression libre, techniques audio‑visuelles, éducation artistique, travaux manuels, expression corporelle, etc.

4°. Nécessité d'une formation permanente

C'est tout au long de leur carrière que les éducateurs doivent avoir la possibilité de s'informer et de se former.

Il faudra que soient organisés de façon régulière des stages, des rencontres où enseignants, psychologues, inspecteurs pourront confronter les expériences, les recherches, et les discuter.

Des stages de perfectionnement devront permettre aux enseignants de s'informer des nouvelles techniques pédagogiques. Ces stages ne seront pas seulement limités à l'enseignement, mais pourront se dérouler en usine, à la campagne, dans les hôpitaux, etc., pour permettre une meilleure connaissance de la vie réelle.

Cette formation permanente pourra être organisée au sein même des établissements, le directeur pouvant en être l'animateur pédagogique.

5°. Importance du choix personnel et de la philosophie de l'éducateur

Au sein d'un même établissement, il est nécessaire d'accorder les points de vue sur les perspectives d'éducation des adultes. Je ne reviendrai pas sur les options philosophiques, déjà exprimées par P.Yvin, touchant à l'individu, aux rapports humains, à la société. On conçoit aisément que l'adhésion volontaire des éducateurs est la condition première de la pratique de l'autogestion.

Cet effort de renouvellement et de perfectionnement des enseignants ne pourra se réaliser que si on leur en offre les moyens : stages compris dans les horaires de travail, facilités matérielles.... et que, parallèlement, les conditions de travail soient améliorées (effectifs, locaux, horaires, programmes). C'est à ce prix seulement que pourra s'amorcer une véritable réforme de l'enseignement.

Cependant, différents groupements d'éducateurs travaillent déjà en vue de la rénovation et de la modernisation pédagogique. Parmi ceux-ci, l'Institut Coopératif de l'Ecole Moderne constitue un vaste chantier de confrontation et de création, par ses groupes départementaux et ses commissions. Il offre à chaque éducateur l'occasion de contribuer à élaborer et à approfondir des outils et des documents.

Par les nombreux stages qu'il organise, dont certains désormais en période scolaire, en collaboration avec d'autres organismes (S.N.I.., C.R.A.P., O.C.C.E.) avec des pédagogues (professeurs, inspecteurs), il apporte sa part dans le recyclage des éducateurs et prépare une sorte d'Université pédagogique permanente.

Lucette MAGNE