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En Chantier n°10 : Le travail de l'école : Contribution à une critique prolétarienne de l'éducation

VIENT DE PARAÎTRE

Philippe GENESTE

Le travail de l’école :
Contribution à une critique prolétarienne de l’éducation

 


Editions Acratie, 15 euros, 180 pages
(en vente en librairie ou chez l’éditeur Acratie, L’Essart, 86310 La Bussière)


Nous avons demandé à notre camarade Philippe Geneste de nous offrir une bonne feuille de  l’ouvrage qu’il vient de faire paraître. La voici :

Traitant d’un fondement rationnel de la critique des compétences, l’auteur en vient à traiter l’introduction du savoir-être dans les textes officiels de l’éducation. Extraits :

L’explication de la place prise par le comportement dans le discours officiel contemporain sur l’école est à chercher, outre dans le fond théorique de l’évolutionnisme philosophique et le naturalisme qui sous-tend depuis toujours les conceptions officielles en éducation, dans le rapport entretenu par la formation initiale avec la formation continue. […]
Le terme a été créé par Jacques Ardoino en 1963 dans le numéro 6 des Travaux et documents – Propos actuels sur l’éducation, introduction à l’éducation des adultes publié par l’Institut d’Administration des entreprises de l’Université de Bordeaux. Ardoino opposait un « savoir être et devenir » aux savoirs et savoir faire plus classiques dans la perspective d’une reconnaissance des acquis de l’expérience de vie et de l’expérience professionnelle dans la formation continue. […]
Le groupe nominal savoir- être n’est, véritablement, entré dans le vocabulaire de l’éducation initiale que dans les années 1980. Le Petit Robert l’ignorait encore en 1977, mais l’entrée dans le vocabulaire de la formation initiale va introniser l’expression. Savoir-être semble élaborée sur le modèle de savoir-faire, soit une construction [verbe + verbe]. Le second (être) est en rapport de subordination au premier (savoir). L’ordre de construction est une ordination de raison. Ne recouvre-t-il pas aussi un raisonnement d’agent de l’ordre, ou dit autrement, ne découvre-t-il pas une fonction sociale affublée au savoir par un pouvoir politique (*) ? En tout cas, le savoir-être est une des composantes du savoir et fait partie de l’arsenal du programme éducatif, soit par ordre d’importance au vu et au su de la réalité de l’enseignement de la fin du XXe siècle :
SAVOIR :
    * savoirs disciplinaires : maths-français-etc.
    * savoir-faire : savoirs pratiques, manuels, techniques, ou relevant d’une application d’un savoir
    * savoir-être : comportement
Première remarque : cette ordination des savoirs s’inverse aujourd’hui, les compétences (savoir faire) prenant le pas sur les savoirs qui sont, aussi, concurrencés par le savoir-être (note de comportement introduite par la loi Fillon et décrétée par De Robien entrant dans le décompte des points pour l’emblématique diplôme du brevet des collèges).
ETRE = sens plein d’exister, vivre, le savoir-être relève de l’aptitude, de l’habileté à mener son existence ; il se confond avec l’art d’exister, avec la manière de vivre, d’avoir, de posséder sa réalité. Qu’en 2002, un ministre de l’éducation, Luc Ferry, ait écrit un ouvrage intitulé « Qu’est-ce qu’une vie réussie ? » alors qu’il était en exercice est symbolique. Dans la corrélation des mots tic et toc de la formation, le savoir-être relève de la gestion de soi et de sa vie. Ainsi, dans les années 1975/1990 l’éducation sociale et familiale a fleuri dans la formation continue, notamment dans tous les stages pour jeunes sans emploi et chômeurs, mais aussi dans le domaine de la précarité. Faut-il rappeler ces propos méprisants tenus par une foultitude de politiciens, de ministres, de chefs d’établissements et d’intendants : un TUC – travail d’utilité collective mis en place par Fabius –, un CES (contrat emploi solidarité) « ça rend service à la personne car ça l’amène à devoir se lever le matin, à reprendre un rythme » ? Avec les stages d’insertion professionnelle, notamment avec les Cycles d’Insertion Professionnelle Par Alternance inscrits dans le BOEN en 1987, le savoir-être a recouvert un champ susceptible d’évaluation. Aujourd’hui, dans l’éducation nationale, sous couvert d’éducation à la citoyenneté, voire à la citoyenneté et à la santé –les deux étant articulées dans des comités au sein des établissements scolaires du second degré–, l’école promeut une standardisation comportementale dans un but de « pacification » sociale comme l’ont dit de nombreux ministres.
[…]

(*) Ce qui explique, entre autre chose, que l’école privilégie depuis toujours une conception bancaire des savoirs, c’est-à-dire une conception des savoirs fétichisés. C’est grâce à cette réification des savoirs et à son acceptation par le corps enseignant dans son immense majorité que la politique actuelle de remplacement des savoirs par des compétences peut trouver à se réaliser sans opposition de fond au niveau professionnel éducatif et pédagogique. Pour ceux qui douteraient de l’acceptation massive des enseignants à la conception bancaire des savoirs, il suffit de regarder le marché du manuel scolaire – et son accompagnateur livre du maître – pour pouvoir s’en convaincre.


la quatrième de couverture

L’école est source de débats multiples. Les experts se bousculent aux portes d’entrée des commissions en tout genre, ils diagnostiquent et prescrivent ; les politiques pérorent, flattent les préjugés réactionnaires ou « modernistes » de leur clientèle électorale ; les syndicats en place proposent et négocient dans le cadre d’une cogestion du système. Bref, l’école ressemble à un chantier permanent sans cesse en réfection. Les médias, qui mettent en scène ces voix, s’efforcent de faire croire que les enjeux s’expriment à travers des oppositions aussi spectaculaires que factices : républicains contre pédagogues, libéraux contre étatistes, partisans de l’enfant au centre, adeptes des programmes d’abord…. Ainsi, sous le bric-à-brac de paroles et d’informations hétéroclites et partielles, l’école devient une réalité virtuelle. Cet ouvrage propose d’écarter ce rideau de fumée. Plutôt que de partir d’idéologies, l’auteur s’appuie sur une expérience professionnelle, militante donc réflexive de l’école. Il met à nu le mécanisme moteur des politiques éducatives des gouvernements successifs, sans s’interdire, si besoin, des coups d’œil rétrospectifs. Il sonde des pratiques pour y trouver le fil conducteur de la conception dominante de l’éducation. Dérangeant, car pointant les faux semblants, l’ouvrage vise à une lucidité afin d’y ancrer un syndicalisme qui reste à construire.

table des matières
(nous ne donnons que les titres des grands chapitres)


première partie

De la mise en cohérence de la formation continue et de la formation initiale
la loi Fillon, loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école

I. une loi en continuité des politiques éducatives des gouvernements précédents, de droite et de gauche
II. de quelques points d’ancrage de la loi
III. la loi pour l’avenir de l’école et la naturalisation des inégalités sociales
IV. la pré-affectation multi-critère (PAM), mythe techno-scientifique, psychologie obsolète ; ou comment un outil pédagogique révèle la logique de la formation professionnelle au sein de la formation initiale
V. de la continuité de la politique de l’enseignement professionnel en France

deuxième partie

Individu et société
formation professionnelle, formation continue
et enseignement

I. de la validation des acquis de l’expérience
II. droit individuel à la formation (DIF) et e-learning, la formation soumise au processus de l’aliénation
III. de la formation continue au lycée des métiers ou du triomphe extensif de la logique économique en éducation
IV. de la notion de compétence au savoir-être en société
V. conclusion

Annexes:
1. petit historique de la formation professionnelle continue
2. bibliographie commentée

Ce travail a été réalisé par le groupe Doc2d (Recherche documentaire au second degré)
Pour nous contacter : bt[arobase]icem-freinet.org" class="moz-txt-link-abbreviated
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