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Empêchez le déplacement d’office

Mai 1933

Sur sa demande, M. l’inspecteur d’Académie m’a reçu le lundi 8 mai. II avait déjà entre les mains, au passage, le rapport que j’ai adressé au Ministre et intitulé : Réponse, à la dernière campagne nationale contre Freinet.

Il n’a pu faire sur ce rapport que quelques objections de détail sur lesquelles nous ne croyons pas utile de revenir.

M. l'inspecteur d’Académie m’invite naturellement à faire ma demande écrite de congé pour régulariser une situation de fait.

Je lui rappelle que, si j’ai demandé verbalement le 21 avril un congé de trois mois, c’est sur son assurance formelle que l'imprimerie à l’école ne souffrirait aucunement de ce geste d'apaisement.

M. l’inspecteur d’Académie en convient bien volontiers. Il me lit même la copie du rapport adressé au Ministre à la suite de l’affaire, et dans lequel il relate en effet la promesse faite : que l’imprimerie à l’école était hors de cause et que je pourrai continuer à travailler comme par le passé, dans la limite des programmes et des règlements - ce que nous acceptons volontiers, puisque nous avons toujours travaillé dans le cadre de l’école publique.

Or, un fait nouveau est intervenu : Dans le communique erroné qu’il a donné à la presse, le Ministre attaque délibérément notre technique en parlant d’une façon évasive et volontairement sibylline d’errements pédagogiques et d’éloges étourdis.

Je ne pouvais donc que maintenir les termes de ma lettre adressée précédemment à M. l’inspecteur d’Académie : « Je ferai ma demande régulière de congé, lorsque M. le Ministre aura bien voulu me faire connaître qu’il approuve l’engagement que vous avez pris pour influencer ma décision ».

M. l’inspecteur d’Académie regrette, certes, ma décision, car il a déjà reçu du Ministre une mise en demeure catégorique : J’avais à faire ma demande dans les trois jours, à défaut de quoi M. l’I. A. devait, avec le Préfet, prendre toutes mesures utiles.

Devant ma décision irrévocable, M. l’inspecteur d’Académie a promis de transmettre au ministre et d’attendre la décision.

* * *

Que sera cette décision ?

Le Ministre acceptera-t-il d’approuver l’inspecteur d’Académie, en désapprouvant, dans une certaine mesure son propre Communiqué ?

Si non, il est certain que ma position irrégulière ne pourra pas se prolonger.

.le l’ai déclaré à l’inspecteur d’Académie :

» Si on ne veut pas me donner mon congé aux conditions acceptées, je suis prêt à reprendre ma classe demain s’il le faut : alors nous prendrons nos dispositions, et nous nous battrons, s’il le faut ».

Mais les autorités, à tous les degrés, ne sont pas disposées à voir recommencer les événements de St-Paul, et à me voir reprendre ma classe de sitôt.

S’IL N’Y A PAS D’AUTRE SOLUTION, ON PASSERA. SANS DOUTE, AU DEPLACEMENT D’OFFICE.

Voilà donc, pour ceux qui craignaient que j’aie fait de trop grandes concessions, quelle est la situation :

Si le ministre approuve l’engagement de l’inspecteur d’Académie de ne pas attaquer l’imprimerie à l’école, je me mettrai en congé régulier de trois mois.

Si le ministre refuse, il y a de grandes chances pour qu’il donne ordre — ou qu’il conseille — de passer immédiatement au déplacement d’office.

Je fais appel à tous les camarades, à toutes les organisations :

Défendez l’imprimerie à l’école et les conquêtes prolétariennes.

Empêchez mon déplacement d’office par tous les moyens : meetings, ordres du jour, intervention auprès de parlementaires, campagnes de presse, pétitions, etc...

IL Y A EXTREME URGENCE ! L’Inspecteur d’Académie reconnaît que je n’ai fait aucune demande de changement de poste. Il me conseille naturellement de faire ma demande pour les prochains mouvements du personnel — ce qui résoudrait définitivement la situation !

A tous nos amis de faire eux-mêmes la réponse qui s’impose...

Agissez de toute urgence !

Le 9 mai 1933.

C. FREINET.

Les Partisans de FREINET à St-Paul passent à l’action SOUTENEZ-LES !

Dans une visite ultérieure à l’inspecteur d’Académie, celui-ci a demandé à Freinet de choisir entre les deux alternatives suivantes : ou faire sa demande de changement pour un poste équivalent, pour octobre — ou bien être déplacé d’office. Qu’il ait des torts ou non, c'est à cause de Freinet que St-Paul est troublé : l’administration ne laissera pas ces troubles se reproduire.

L’I.A. ayant, de plus, sous la pression réactionnaire, retiré à Freinet l’autorisation de s’occuper des candidats, les partisans de Freinet ont décidé de faire une semaine de grève qui a pleinement réussi. Sur 28 inscrits. 13 à 15 élèves fréquentent la classe — comme au temps où Freinet travaillait. Les parents sont bien décidés à l’action. Soutenez-les ! Le 25-5-33.