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Pédagogie universitaire, formation et coopération : propositions pour les assises de l'enseignement supérieur

Par Florence Saint-Luc le 20/10/13 - 07:49
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 L’Institut Coopératif de l’Ecole Moderne a été fondé par Freinet en 1947, avec des fondements philosophiques orientés sur une éthique humaniste. La formation est assurée avec un lien étroit entre théorie et pratique, et l’élaboration d’outils spécifiques expérimentés et validés. La mise à jour constante des savoirs et la théorisation des pratiques s’effectuent dans le cadre d’échanges entre pairs. La participation à des productions donne un statut d’auteur. Une culture intellectuelle commune se construit grâce la communication via de nombreux canaux et contribue à la professionnalisation. Face à une demande a priori contradictoire de concilier employabilité et humanisme, les pédagogies coopératives peuvent constituer des apports particulièrement novateurs, y compris à l’université, sur la base d’une volonté d’assurer une articulation, voire une cohérence entre  éducation, formation et recherche :

- La coopération mise en œuvre permet l’éducation à la démocratie. L’auto-organisation suscite la créativité, aussi bien au niveau des personnes que du (des) groupe(s). Les dimensions internationales et populaires fondent l’interculturalité.
- la personne, les médiations individuelles et culturelles de toutes sortes et l’expérimentation dans le réel sont prises en compte dans le processus de construction des connaissances (dans la zone proximale de développement) avec une capacité à réagir à l’imprévu et à l’intégrer de manière organisée. La posture dialogique met en tension rigueur et souplesse, enracinement et universalisme.
Dans ce contexte, il s’agit d’une initiation à la complexité[1], un processus qui implique une formation tout au long de la vie. Les conditions de la professionnalisation, au sens défini par P. Perrenoud (1994)[2], semblent réunies pour l’essentiel dans ce processus d’auto-formation coopérative, à travers les listes d’échanges, les groupes départementaux ou régionaux, les chantiers de travail, les rencontres nationales et internationales, la revue Le Nouvel Éducateur et les ouvrages publiés aux Éditions ICEM.
1.     L’ORGANISATION
L’ICEM[3], membre de la FIMEM[4], Fédération Internationale des Mouvement de l’Ecole Moderne, est une association agréée par le Ministère de l’Education Nationale ; départements, secteurs, et chantiers de travail publient des revues pédagogiques. L’ensemble constitue un véritable réseau, fondé sur des échanges virtuels comme sur des rencontres. 
2. LES RENCONTRES
Echanges et actions de formation se déroulent à l’échelon départemental, régional, national et international. Les congrès constituent des lieux de synthèses, bouillonnements pédagogiques et point de départ de réflexions et projets, un espace/temps privilégié pour tous ces réseaux, où s’expriment les expériences, les productions et les pratiques d’enseignants issus de multiples horizons à la fois géographiques et professionnels, aspect qui caractérise également les stages.
3. LES PERSPECTIVES ET LES PARTENARIATS POSSIBLES
L’ICEM peut apporter le savoir-faire et la dimension de son réseau dans le cadre de la refondation de l’école, en intervenant directement dans la formation continue et initiale des enseignants (comme elle l’a déjà fait à de nombreuses reprises dans le passé, selon les capacités de l’institution à accueillir, à s’ouvrir..) : accueil dans les classes, accompagnement par un collectif professionnel, interventions dans les futures ESPÉ, construction de modules réels de formation, accompagnement sur l’analyse des pratiques, aide à la mise en place d’innovations pédagogiques, et en proposant des exemples de pratiques alternatives dans le domaine de la pédagogie universitaire.
Un réel partenariat peut donc se construire entre université, instances de formation, et praticiens chercheurs d’un mouvement pédagogique ancré sur l’innovation, la coopération et l’ouverture à l’international.
4. QUELQUES PROPOSITIONS  DE L’ICEM  POUR LA REFONDATION DU SYSTEME EDUCATIF UNIVERSITAIRE ET EN PARTICULIER LA FORMATION DES ENSEIGNANTS
Dimensions transversales dans le système éducatif
Observation du réel, place de l’expérimentation, de la coopération et développement de l’esprit critique à tous les niveaux de l’enseignement, de la maternelle à l’université ;
Dimensions spécifiques à l’enseignement supérieur
Création d’un diplômede pédagogie universitaire pour les intervenants dans l’enseignement supérieur (déjà fonctionnel en Belgique) ;
Valorisation des pédagogies universitaires innovantes, appuyées sur les théories de l’apprentissage, intégrant les apports du constructivisme et du socio-constructivisme : aide à la publication et à la diffusion  de ces expériences ;
Reconnaissance du statut des Sciences Humaines et Sociales, essentielles pour une « Science avec conscience » ;
Formation des enseignants
Former à la coopération
Mise en place d’une formation à la coopération, à la prise en compte de l’hétérogénéité, et à l’éducation à la démocratie, au travers d’une véritable démarche coopérative d’apprentissage[5] ;
Se former par le développement d’un point de vue multiréférentiel pour agir sur le terrain
Coopération entre disciplines, didactiques, et aspects transversaux avec les praticiens dans le cadre de l’observation de pratiques – point de départ indissociable des contenus de formation à partir de l’analyse de pratiques ;
Création d’établissements scolaires de formation et d’innovation envisageant l’ensemble du parcours scolaire : des écoles fondamentales de la continuité et de la cohérence de 3 à 16 ans rattachés aux ESPÉ, y compris pour le Second Degré.
Former à la recherche
Mise en œuvre d’une formation par la recherche : importance donnée à la formation à la recherche par la recherche. Rendre les enseignants auteurs et acteurs de leur propre recherche ;
Formation développant la créativité et l’expérimentation d’outils et de situations pédagogiques[6] ;
Valorisation des travaux sous la forme d’aide à l’expérimentation, à la production, à l’édition, et à la diffusion d’outils et de productions alternatives et innovantes ;
Alternance intégrative (lien entre théorie et pratique : apports théoriques en fonction des situations vécues sur le terrain et des difficultés rencontrées) et projective (travail sur les finalités pour fonder un véritable projet éducatif)  pour la formation des enseignants, avec une réelle progressivité[7] (stages d’observation, puis prise en charge de séquences élaborées et critiquées coopérativement par les stagiaires, utilisation de la vidéo pour développer la réflexivité et prendre conscience des dimensions cachées de l’activité, et enfin prise en charge autonome de classes par les stagiaires pour des périodes d’au moins deux semaines).
Reconnaissance du statut de praticien chercheur
Décloisonner les savoirs
Approche interculturelle de l’enseignement du français pour une meilleure intégration de la diversité culturelle
Valorisation du travail en groupes coopératifs au travers de séminaires de recherches entre étudiants ;
Polyvalence de la formation des futurs enseignants de primaire, dès la 1ère année (déjà fonctionnel en Finlande) ;
Introduction de la bivalence ou trivalence pour les professeurs de secondaire ; formation disciplinaire et aspects transversaux : Sciences de l’Education - pédagogie, didactique, psychologie, etc. (déjà fonctionnel en Finlande)
Former,  se former à l’international
Développement de partenariats internationaux pour :
-   effectuer une part importante des stages de formation dans un autre système éducatif, afin de prendre du recul sur son propre système éducatif,
-   comprendre l’importance de la dimension culturelle, avec possibilité de travail dans un autre contexte linguistique (pour appréhender les difficultés des élèves étrangers dans son propre système, et/ou développer la maîtrise d’une autre langue étrangère) ;
Former par et pour l’innovation
Intégration des mouvements pédagogiques dans le processus de professionnalisation des enseignants : accueil dans les classes, accompagnement professionnel, valorisation des efforts de formation dans le milieu associatif et dans le monde du travail en général, partenariats universités mouvements pédagogiques, interventions dans des processus de formation en université ;
Développement des échanges et des stages à l’étranger entre formateurs, y compris dans le cadre de leur formation universitaire et de terrain ;
Reconnaissance professionnelle des praticiens-formateurs ;
Intégration du processus de formation universitaire des tuteurs ou mentors (formateurs de terrain) en articulation avec la formation initiale[8] ;
 
Connac Sylvain, Francomme Olivier, Morin Denis, Saint-Luc Florence

[1] Morin E. (1999) Les sept savoirs nécessaires pour l’éducation du futur http://unesdoc.unesco.org/images/0011/001177/117740fo.pdf
[2] Perrenoud P (1994), La formation des enseignants entre théorie et pratique, Paris : L’harmattan
[8]propositions de formation fondées sur des pratiques effectives à l’étrangerhttp://www.ecolechangerdecap.net/spip.php?article261&lang=fr