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Pour le contrôle des conditions de travail dans l'enseignement

Mai 1961

Au cours des conférences que je viens de faire à Bourg, Grenoble et Albertville et au cours desquelles j'ai pu parler à 2 000 camarades, j'ai été amené à insister tout particulièrement sur les conditions de travail qui apparaissent maintenant comme le principal obstacle à l'introduction de nos techniques dans les divers cours de l'Education Nationale,

Nous sommes persuadés en effet que si la surcharge des classes n'était pas depuis longtemps la norme ; si les locaux étaient mieux construits et si l’Etat prévoyait des classes ateliers suffisamment spacieuses au lieu des cellules étriquées où maîtres et élèves n'ont pas même la possibilité de circuler ; si le principe des écoles-casernes était dénoncé et s'il était possible de faire éclater les groupes pléthoriques en unités pédagogiques de quatre à six camarades disposés à collaborer ; si enfin l’Ecole était munie de l’outillage moderne indispensable, presque tous les éducateurs s'orienteraient aujourd’hui vers le conception de la classe que nous préconisons.

Par contre, nous pouvons affirmer que l'aggravation de ces conditions de travail rend toujours difficiles les progrès de nos techniques — comme de toute autre méthode d'ailleurs.

Dans l’état endémique actuel elle apparaît comme un véritable sabotage de notre enseignement public laïc.

Nos efforts amènent alors les éducateurs à prendre conscience de certaines formes nouvelles de revendications qui devraient doubler et compléter les traditionnelles revendications d’avancement et de salaires.

L'efficience de l'Ecole, le climat nouveau du travail, l’intégration de l'activité scolaire dans la complexité vitale de l'éducation sont des éléments essentiels du succès de revendications qui auront alors le complet appui des organismes économiques et des parents d'élèves.

Nous sommes là à l'origine d’un aspect revendicatif qu'on a beaucoup trop négligé :

L'action syndicale a eu, dans toutes les professions, un triple aspect : salaires - Sécurité sociale (allocations familiales, maladie, retraite etc.,.) - amélioration des conditions de travail.

C'est ce troisième aspect qui est chez nous totalement négligé.

La Sécurité Sociale possède un corps de contrôleurs qui visitent périodiquement les entreprises (Ils sont venus souvent à la C.E.L.) pour vérifier si les employés bénéficient d'une ration normale d'air et de soleil, et si les mesures de sécurité nécessaires sont assurées dans les ateliers de travail.

Dans la plupart des corporations — peut-être dans toutes (nous allons nous en informer)— des Commissions de contrôle existent, qui fonctionnent en permanence et auxquelles ont recours les ouvriers menacés parfois par des dangers que des précautions rationnelles pourraient éviter.

Or, rien de tel n'existe dans l'enseignement, la corporation pourtant qui traite le matériau le plus précieux : l'enfant dont nous devons faire un homme. Aucun organisme de Sécurité sociale ne vient vérifier dans quelles conditions nous travaillons, si le cubage d'air légal nous est assuré, si la place est suffisante, le nombre d’élèves acceptable, s'il y a les outils indispensables et si notre santé et celle des enfants ne sont pas en danger (n’oublions pas que l’accroissement du nombre de maladies pulmonaires et nerveuses témoigne chez nous de ce même danger),

Il en résulte que l’instituteur, abandonné à lui - même et à ses problèmes qui sont des problèmes publics, se sent seul et impuissant pour réclamer ; si, excédé, il se plaint aux maires ou à l’administration, ses réclamations sont toujours considérées comme des actes individuels et souvent réprimés comme tels (les exemples sont hélas ! nombreux et probants),

Les nombreux camarades à qui nous avons exposé cet aspect particulier de nos revendications ont pensé qu’il y aurait lieu de demander en effet :

La constitution officielle d’une Commission de contrôle quadripartite : administration - Sécurité sociale (ou M.G.E.N.) - éducateurs représentés par leurs organisations syndicales - parents d'élèves. Les instituteurs paient un trop lourd tribut aux affections pulmonaires et à la fatigue nerveuse ; les enfants souffrent trop dans leur santé, leur éducation et leur vie des mauvaises conditions dans lesquelles ils sont placés pour que nous n’essayions pas de normaliser réglementairement, rationnellement et humainement nos conditions de travail.

Nous souhaiterions que nos camarades discutent ici même de cette suggestion. Nous pourrions alors soumettre nos projets aux organisations syndicales.