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Y-a-t-il relâchement dans la discipline et comment réagir ?

Dans :  Techniques pédagogiques › organisation de la classe › 
Janvier 1959

Il y a un incontestable relâchement dans la discipline, ou plutôt le monde des parents, et des maîtres aussi, est à la recherche d’une discipline.

Nous avons connu le temps, au début du siècle, où le père était dans la famille le maître omnipotent, qu’on sert avec crainte et déférence, comme les serfs servaient les seigneurs. Les enfants d’alors ne se seraient pas avisés certes de discuter ou de regimber, ni de parler à table. Ils étaient en tous points des êtres mineurs que les parents devaient dresser, et qu'ils dressaient par des moyens appropriés.

On peut porter des critiques contre cette discipline, qui était d’ailleurs à l’unisson de la discipline scolaire. Mais cette discipline existait. Etait-elle si totalement nocive ? Ma foi, comme est nocive la discipline d'un état autoritaire où les gendarmes sont gardiens d’un ordre dont les sujets n’ont point décidé. On tâche de tourner la loi, d’éviter les coups et les procès -verbaux, et de se ménager, à 1’écart des règlements un morceau de vie intime et familière qui contrebalance en partie la rigueur sociale.

Ecoutez les vieux raconter leurs exploits d'écoliers en classe ou hors de l’école, en réaction justement contre 1’autorité dont ils subissaient le poids. Nos enfants sont aujourd’hui de petits saints en regard de la hardiesse, de 1’audace et du mépris de l’autorité de nos pères.

Mais l’ordre extérieur était sauf.

Ce double jeu, la nécessité où sont les individus de garantir au maximum leur personnalité contre les emprises de l’autorité, cette sorte de marché noir du comportement, ne contribuaient certainement pas à préparer les enfants pour une vie sociale à tendance coopérative et communautaire. Ils y apprenaient à faire semblant d'obéir et à se débrouiller.

Le système D en est 1’aboutissement.

Théoriquement, cette discipline autoritaire a disparu. Il n’en subsiste que des reliquats disparates parmi lesquels l'enfant, comme l’adulte, trouve toujours une faille. Aujourd'hui tous les hommes naissent libres et égaux en droits, et les châtiments corporels sont interdits.

Mais dans la pratique, on n’a que très exceptionnellement accédé à une discipline consentie susceptible de maintenir l’ordre et 1’harmonie pourtant indispensables. Période de transition où les vieilles méthodes ont perdu de leur vigueur et où se dessine à peine 1’organisation nouvelle. Les parents autoritaires apparaissent couine brutaux et inhumains ; s’ils sont débonnaires, ce sont les enfants qui commandent, et parfois battent leurs parents, ce qui n’est pas mieux.

Alors on récompense, plus par faiblesse que par humanité. Et nous. connaissons de nombreuses familles où les bonbons, les jouets et même l'argent constituent les bases fragiles d'un immoral marchandage

Il serait évidemment souhaitable de sortir de cette indécision et de trouver une ligne de conduite dans les relations adultes-enfants.

Faut-il s’en retourner à droite vers l’autorité brutale que maintiennent récompenses et punitions, y compris les châtiments corporels ; vers une fermeté qui trouverait son pendant dans le déclin actuel de la démocratie au profit de l’autorité et de la dictature?

Ou bien irons-nous à gauche vers une anarchie plus ou moins sentimentale qui ne réussit que rarement et avec des êtres de choix ?

La solution est, ici aussi en un juste milieu, mais avec des fondements nouveaux dont on a trop négligé Jusqu'ici la portée : 1’ORGANISATION COOPERATIVE et la DISCIPLINE DU TRAVAIL.

Nous dirons comment l’Ecole Moderne en a préparé la pratique et ce que peuvent faire, dès maintenant les parents à la recherche de 1’indispensable harmonie familiale et sociale.