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LES FICHIERS AUTO- CORRECTIFS dans le processus des Techniques Freinet

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Novembre 1957

Ln grande masse des instituteurs usera bientôt des fichiers auto-correctifs dont nous sommes les initiateurs comme elle use du texte libre, cette grande et générale réussite pédagogique.

Nous nous méfions toujours quelque peu cependant des éducateurs qui, prenant un de nos outils, et pas toujours le plus efficient, disent : « Je fais les techniques Freinet ». Nous avons déjà dit à diverses reprises, dans quelles conditions minima doit être pratiqué le texte libre pour qu’il garde quelques-unes au moins des vertus majeures que nous lui connaissons. La question est encore plus délicate avec les fichiers auto-correctifs qui ne sont, qu'une pièce d'un ensemble dont ils ne sauraient être extraits au risque de fonctionner peut-être à contresens.

Nos fichiers auto-correctifs sont des fichiers d'entrainement mécanique. Ils sont basés sur ce principe que lorsque vous savez faire une addition ou une multiplication vous n’en êtes encore qu'au premier stade de votre apprentissage, comme le petit enfant qui a fait ses premiers pas d’une chaise à l’autre, qui a donc réalisé son équilibre, qui « sait marcher », mais qui a besoin encore de plusieurs années d’exercices vivants pour avoir la parfaite maîtrise de ses évolutions.

Les fichiers auto-correctifs permettent cet entrainement selon une formule individualisée et auto-corrective qui constitue incontestablement un gros progrès pédagogique.

Mais l'exercice ainsi répété mécaniquement ne donne point, ou ne développe que très sensiblement le sens mathématique qui est à l'apprentissage du calcul ce que l'équilibre est à la marche. Il y faut une suite ininterrompue d’expérience tâtonnée qui donne aux enfants la notion indispensable d’opérations, de problème, avec les combinaisons multiples de solutions possibles.

Les pratiques traditionnelles essaient d'y pourvoir par les leçons du maître, concrétisées si possible, mais qui ne sont cependant qu’exercices scolastiques non liés à la vie des enfants, ou très artificiellement à cette vie.

La première étape, et indispensable, de notre méthode de calcul, c’est le calcul vivant dont nous avons donné de multiples exemples dans cette revue. Il s'agit de partir des réalités de la vie, des problèmes tels qu'ils se présentent à nous pratiquement, comme nous partons de la vie de l’enfant par le texte libre. Contrairement à ce qu’on pourrait craindre, les problèmes abondent. On pourrait dire, hélas ! que la vie actuelle n'est que problèmes, et parfois insolubles ! Ce sont ces problèmes qui seront à la base de notre méthode. Les enfants se les poseront, les poseront d'abord, même s'ils ne savent pas toujours les résoudre. Mais nous serons du moins sortis du cercle scolastique pour toucher à une réalité précieuse pour notre enseignement.

Chemin faisant, comme l’enfant qui éprouve le besoin de se déplacer, nous sentirons la nécessité de manœuvrer avec habileté et rapidité les mécaniques qui permettront une solution précise des problèmes pesés. L’enfant voudra alors savoir faire les opérations, manœuvrer les décimales et les nombres complexes, jongler avec les lignes dans les problèmes de géométrie.

Les fichiers auto-correctifs répondront à ce besoin. Autrement dit, s’il n’y a pas de calcul possible sans une maitrise des mécanismes, il y a encore moins calcul sans la part d’intelligence et de bon sens qui est indispensable pour la solution des problèmes que pose la vie.

Et nous rappelons que nos fichiers ne sont pas particulièrement originaux dans la présentation ou la progression des exercices, auxquelles nous avons cependant apporté tous nos soucis. Ce qu’il y a de nouveau et d'original dans nos fichiers c'est la nature et la forme même de l'outil nouveau individualisé et auto-correctif.

Donnez comme devoirs à vos élèves les séries d'exercices qui, dans les manuels suivent les leçons, ils en seront excédés comme nous en avons été excédés nous-mêmes.

Prenez ces mêmes exercices que vous collez sur des fiches 10,5 x 13,5, avec fiches de réponses rouges correspondantes. Les enfants vont, prendre les fiches lorsqu'ils veulent et au rythme qui leur agrée ; ils se corrigent tout seuls. Et les voilà enthousiasmés. C'est pourquoi nous avons recommandé aux débutants qui ne peuvent pas encore acheter nos fichiers, de les constituer eux-mêmes en mettant en pièces leurs manuels.

Un de nos jeunes instituteurs nous écrit à ce sujet :

« J'utilise, depuis plusieurs années, au C.E., vos fichiers auto correctifs, en particulier en calcul. Or, à une des dernières inspections il m'a été reproché « l'usage d’un fichier de calcul qui ne va pas sans inconvénients. Il entraîne au calcul numérique par des séries d'opérations sans qu'il soit fait appel à leur sens, ce qui n'est pas éducatif. »

L'Inspecteur a raison. Mais nous l'approuvons moins lorsqu'il ajoute :

« Il faut expurger ce fichier, concrétiser les nombres, introduire des thèmes de calcul ».

Je sais que ce sont là les processus habituels. Nous séparons davantage compréhension et mécanismes et nous sommes persuadés que notre calcul vivant, comme le texte libre, apparaîtra sous peu comme la solution d'avenir des problèmes que l'éducation mathématique pose aux éducateurs.

En résumé :

— Calcul vivant, rattaché aux préoccupations du milieu, qui fait acquérir le sens mathématique ;

— Exploitation mathématique de ces problèmes vivants ;

— Fichiers auto-correctifs pour l'entrainement mécanique ;

— Possibilité pour tes éducateurs d’aménager les fichiers existants ou d'en faire d'autres par découpage et collage.