Des femmes et des hommes des couches populaires reçoivent les propos du Front national, comme seules paroles d’avenir possible. Ils ressentent la peur, parfois la haine de l’autre qu’il soit étranger, jeune de banlieue, SDF… et ils sont prêts à mépriser, à enfermer, à exclure.
Ces femmes et ces hommes regardent, écoutent, lisent sans critiques les ersatz d’informations et de culture qu'on leur jette en pâture. Ils se pensent incompétents et se fient aux experts proclamés des plateaux de télé et des journaux.
Ces hommes et ces femmes ne comprennent pas les enjeux des institutions politiques, ils se sentent impuissants et les rejettent. Les sondages font office de participation politique et le plus souvent, ils s’abstiennent aux élections.
Ces hommes et ces femmes étaient à l’école il y a quelques années, dix ans… voire quelques décennies. Même si elle accueille de plus en plus d’enfants dont les familles sont minées par une dégradation de leurs conditions de vie, les responsabilités de l’école sont évidentes :
- en reproduisant les inégalités sociales, elle exclut précocement de l’éducation et de la culture une partie de la jeunesse et la laisse démunie, frustrée et humiliée ;
- par la transmission des savoirs basée uniquement sur les fonctions intellectuelles reconnues, méprisant ainsi les cultures, les personnalités, les vécus de chacun, cette école provoque chez beaucoup d’enfants un sentiment de rejet souvent révélé dés l’entrée au collège par le décrochage scolaire et des comportements violents. Ce sentiment d’injustice engendre également méfiance et rejet de l’autre ;
- par la compétition omniprésente, elle isole l’individu au détriment du vivre ensemble et renforce l’individualisme qui devient d’autant plus néfaste aujourd’hui qu’il n’est plus contrebalancé par la solidarité qui existait autrefois par exemple au sein de la classe ouvrière…
- en orientant professionnellement trop tôt les élèves, l’École ne permet pas à tous l’accès à la culture, à la compréhension du monde et de l’humanité.
Pour les enseignants et les éducateurs, l’enfant est le plus souvent réduit à un rôle d’élève obéissant, à un « vase à remplir » qui n’est pratiquement jamais consulté, ni responsabilisé. Cet adulte en devenir se découvrira citoyen le jour de ses dix-huit ans sans aucune expérience de participation, de prises d’initiatives ou de responsabilités.
Freinet disait déjà en 1921 dans un bulletin de l’École Emancipée : « Si nous ne trouvons pas de réponses adéquates à toutes les questions d’éducation, nous continuerons de forger des "âmes d'esclaves" à nos enfants ».
En 2014, on en est toujours là !
La refondation de l’École annoncée n’a pas eu lieu.
Ne baissons pas les bras !
Prônons une École où la libre expression, le respect des cheminements singuliers d’apprentissage et les pratiques coopératives permettent à chaque enfant de trouver sa place.
Défendons une École nourrie d’entraide où chacun puisse se construire avec l’autre, donner son avis, participer à son organisation et être auteur de projets.
Et comme l’éducation ne s’arrête pas aux portes de l’Ecole, travaillons partout pour une éducation émancipatrice, populaire et ambitieuse qui développe pour tous, la réflexion et la curiosité, la maîtrise des langages, l'accès aux savoirs et à la culture.
Continuons le combat au sein des mouvements pédagogiques, des associations d’éducation populaire, des associations de quartier et de village.
C’est urgent, l’enfant qui entre à l’école aujourd’hui sera l’adulte de demain !
La démocratie, ça se prépare !
Votre enthousiasme est mobilisateur
Bonjour,
Bravo pour cet article anti-fatalisme ! Je suis éducateur et je vois tous les jours la morosité ambiante envahir peu à peu des adultes qui ne croient plus à l'enfant et pire encore parfois, il ne croit plus en leurs missions éducatives.
Quand je vous lis, je ne peux qu'espérer que votre appel soit entendu et se propage aussi rapidement que le défaitisme.
Merci à vous
Marcel
Educateur
http://nhnp.ek.la