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Dans :  Sciences et Techno › 
Juin 1990
LA SOIE DANS LE MONDE ANIMAL
 
La soie est le seul fil continu et de grande longueur fourni par la nature. Elle est, bien sûr, produite par le ver à soie, espèce domestiquée par l'homme, mais aussi par un grand nombre d'autres espèces animales.
 

De nombreux invertébrés produisent de la soie. Chez les insectes, la larve du phrygane qui se confectionne au fond de l'eau un fourreau de protection, fabrique un filet en soie qui lui servira pour « pêcher » ses proies. D'autres insectes comme les staphylins, des mouches, des taons, certaines puces utilisent la soie pour la fabrication de logettes d'abris, par exemple, cocons.
 
LA SOIE MARINE
 
Plusieurs groupes de coquillages comme les moules, les pectens (coquilles saint-Jacques) se fixent sur les fonds marins par l'intermédiaire d'un byssus, touffe de filaments très fins sécrétés sous forme d'un liquide soyeux durcissant au contact de l'eau.
Le byssus du jambonneau, coquillage de grande dimension répandu au large des côtes méditerranéennes, a été remarqué depuis l'Antiquité. Il était exploité pour fabriquer des étoffes, des habits d'apparat ou des ornements somptueux destinés aux femmes grecques et romaines. Cette industrie, répandue le long des côtes dalmatiennes de l'Italie, mais aussi à Palerme, à Naples, sur l'île de Malte, a subsisté à Tarente jusqu'à ces dernières années.
 
Houppe confectionnée à partir du byssus du jambonneau
 
Musée océanographique de Monaco.
 
Jambonneau
 
 
 
 
 
 
 
 LA SOIE D'ARAIGNÉE
 
Les araignées sécrètent de la soie pour fabriquer les cocons qui protègent leurs œufs. Elles l'utilisent aussi comme fil de sécurité pour amortir les chutes lors de déplacements, fil de rencontre entre les individus d'une même espèce, fil de dispersion permettant la dispersion des jeunes au gré des vents, et bien sûr, fil de chasse sous la forme des célèbres toiles d'araignées. La soie des araignées est sécrétée au niveau des filières abdominales.
 
L'homme a tenté d'utiliser les araignées comme source d'approvisionnement en soie. Il faut dire que la soie d'araignée est plus fine et plus tenace (résistante) que celle du ver à soie. Au XVIIIe siècle, la récolte des nids en soie de l'épeire diadème, avait permis de fabriquer quelques paires de bas et de gants en soie (une paire de bas a été offerte au roi Charles III).
 
Araignée Nephila madagascariensis et bobines de soie
 
À partir du XIXe siècle, il y eut des tentatives d'élevage d'araignées de grande taille. A Madagascar, on tirait la soie directement de l'araignée vivante à l'aide d'une machine conçue spécialement pour cet usage. La soie produite par la néphile de Madagascar Nephila madagascariensis, encore appelée halabé, était de couleur jaune doré. Elle a permis de confectionner quelques étoffes. Au XXe siècle, les coûts de fabrication très élevés ont conduit à l'abandon de cette tentative d'exploitation.
Très récemment encore, les fils de soie d'araignées étaient employés dans la confection de réticules pour les instruments d'optique.
 
LA SOIE SAUVAGE
 
Chez de très nombreux lépidoptères, la chenille se confectionne un cocon de soie à l'intérieur duquel elle se transformera successivement en chrysalide puis en papillon. La soie est émise sous la forme d'un fil continu pouvant atteindre plusieurs centaines de mètres de long.
 
Les espèces de papillons séricigènes produisant les fils de soie les plus longs et les plus résistants, mais aussi les cocons les plus facilement dévidables, ont depuis longtemps intéressé l'homme pour la confection de pièces vestimentaires ou décoratives. Parmi les quatre cents espèces de papillons séricigènes, environ quatre-vingts espèces ont été exploitées pour la production de soie sauvage (par opposition à la soie du bombyx du mûrier).
Aujourd'hui, seules quelques espèces sont encore utilisées, principalement en Asie (Inde et Chine). La production de soie sauvage représente environ 10 % de la production totale de soie.
 
La soie Tussah est la plus répandue. Elle est produite par plusieurs espèces asiatiques appartenant toutes au genre Antheraea. Généralement, l'élevage des chenilles s'effectue directement sur les arbres de la forêt tandis que certaines opérations comme la reproduction sont strictement contrôlées par l'éleveur.
La soie Muga est produite par les chenilles d'Antheraea assamensis, espèce localisée dans la vallée du Brahmapoutre en Inde. Cette soie est d'une remarquable couleur jaune d'or.
 
La soie Éri provient de l'élevage de celles appartenant toutes au genre Philosamia. Par ailleurs, certaines populations asiatiques mangent des chrysalides.
 
Bombyx eri
 
D'autres types de soie autrefois répandus tendent aujourd'hui à disparaître. La soie Fagara était répandue depuis le Soudan jusqu'à l'Australie. Elle est produite par les espèces du genre Attacus comprenant les plus grands spécimens connus de papillons.
 
Attacus, le plus grand papillon de nuit
 
 
 
Les espèces du genre anaphe sont de petite taille et se rencontrent en Afrique. Elles confectionnent des cocons collectifs dont la soie était jadis utilisée.
 
A une époque où le développement économique des pays du Tiers monde est d'actualité, la culture de la soie sauvage pourrait se révéler rentable pour un certain nombre de pays. Elle pourrait s'avérer, par ailleurs, écologiquement intéressante de par la préservation et l'entretien de la forêt qu'elle engendrerait nécessairement.
 
 
 
 
 
 
 
 
Joël Clary Conservateur adjoint du musée Guimet - Lyon (Rhône)
 
 
 

 

Source : 
BT 1019 juin 1990
Crédit iconographique : 
Marjolaine Billebault, Marie-France Puthod