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Pour un Nouveau Plan d'Etudes Français : Le certificat d'études

Mai 1937
« Nous apportons aujourd’hui notre contribution au projet de réorganisation du Certificat d’Etudes. Nous demandons à nos lecteurs de nous adresser sans retard leurs critiques. Nous les joindrons au dossier Hulin pour la mise au point définitive d’un projet qui paraîtra en numéro spécial commun de Pour l’Ere Nouvelle, L’Ecole Nouvelle, L’Éducateur Prolétarien, sous la responsabilité commun du Groupe Français d’Éducation Nouvelle, du Groupe du Nord de l’École Nouvelle et de l’Imprimerie à l’École.
Nous regrettons de ne pouvoir donner des documents plus nombreux. Nous pourrions en communiquer copie à ceux qui nous le demanderont.
«  AVERTISSEMENT
 
Lorsqu’on parle d’un examen on doit considérer trois choses :
1. Le passé dont il doit contrôler travail et rendement.
2. Le présent : la matière elle-même. Les enfants et ce qu’on doit normalement et humainement en attendre.
3. Le futur. L’utilisation scolaire et sociale qui sera faite du diplôme donné.
Pour préciser le n° 1 il serait, pensons-nous, plus normal de préciser les points 3 et 2 d’abord, ce qui nous aidera à établir le programme lui-même du C.E.P.E.
1. Utilisation scolaire et sociale du C.E.P.E.
Jusqu’à ce jour l’utilisation scolaire du C.E.P.E. était à peu près nulle. Le nouveau projet tend à en faire un examen de passage du 1er au 2e degré.
La possession du C.E.P.E. sera obligatoire pour tous ceux qui voudront pénétrer au 2e degré.
Cette finalité est cependant tempérée par la création d’un cycle d’orientation au bout duquel les enfants munis du C.E.P.E. seront plus spécialement fondés quant aux branches vers lesquelles ils doivent être dirigés.
Le C.E.P.E. ne sera donc pas un concours de passage, mais seulement une sorte d’examen de base. Les enfants seront contrôlés au cours de leurs années d’orientation.
Mais l’utilisation du C.E.P.E. tend par contre à être renforcée.
Disons tout de suite qu’il est normal qu’on exige des candidats à certaines fonctions un minimum d’acquisition et de technique.
Il suffit maintenant de s’entendre sur ce minimum.
De ce court examen, il résulte :
1. Que le C.E.P.E. n’est pas un concours d’entrée au second degré, mais le contrôle de base avant d’entrer dans le cycle d’orientation.
2. Que le C.E.P.E. sera simplement une attestation que celui qui le possède a suivi régulièrement les cours d’enseignement primaire, qu’il a acquis les connaissances et les techniques dont la possession paraît nécessaire et indispensable dans la vie à 12-13 ans.
S’il en est ainsi, si l’École remplit bien son rôle, le C.E.P.E. devrait être pratiquement donné à tous les enfants.
L’échec au C.E.P.E. montrerait seulement que le candidat n’a pas suffisamment, pour diverses raisons, sociales, individuelles ou scolaires profité de l’enseignement primaire. Des cours spéciaux devraient être institués pour leur permettre d’acquérir ce minimum indispensable.
A notre avis, il faudrait bien s’entendre sur les bases et faire admettre les principes essentiels.
1. Tout enfant doit posséder le C.E.P.E.
2. L’enfant qui n’a pas le C.E.P.E. redouble des classes dans des cours spéciaux de récupération qui lui permettent d’obtenir le C.E.P.E.
 
CE QU’ON DOIT ATTENDRE DES CANDIDATS
 
S’il en était ainsi, il faudrait se mettre parfaitement d’accord sur l’acquisition et les techniques dont le C.E.P.E. doit exiger la possession.
Si les bases ci-dessous sont admises, on ne cherchera plus à hausser inconsidérément le niveau afin que seuls y accèdent ceux qui sont le mieux doués et qui y ont été spécialement préparés. Au contraire, il faudra que ce niveau soit psychologiquement et scientifiquement établi comme fin naturelle de l’enseignement du 1er degré.
Si les épreuves étaient imprégnées de ce nouvel esprit, il n’y aurait pas grand’ chose à changer à notre examen actuel, pour en faire le contrôle raisonnable que nous désirons.
Lire, écrire et compter reste à la base de cet examen ; nous en ferons l’essentiel aussi :
Lire, écrire et compter restent à la base de lecture, qui n’existent pas du tout. Car il ne faut pas considérer seulement la lecture à haute voix d’un texte, mais aussi et surtout la lecture muette par la compréhension et l’utilisation d’un texte du niveau des enfants (technique indispensable, puisque l’enfant n’aura jamais ou presque jamais plus tard à lire à haute voix, il aura par contre à lire des yeux et à comprendre ce qu’il lit).
Il serait facile d’établir des épreuves intelligentes de lecture et d’utilisation de ces lectures. Il suffirait de présenter aux enfants des fiches imprimées, contenant des textes de leur niveau. Ils auraient un certain temps pour les lire et auraient ensuite un court résumé à donner ou bien ils répondraient à des questions qui y auraient été incluses, questions simples, compréhensibles, sans rébus, qui s’éloigneraient au maximum de l’épreuve à colle pour en venir à l’épreuve de lecture intelligente.
Il y a des combinaisons infinies dans ce domaine, depuis l’histoire à raconter, jusqu’aux questions dont on attend une réponse intelligible.
écrire : Il y a deux considérations qui pour le psychologue se tiennent parfaitement, mais qu’on peut cependant pour la commodité du contrôle, séparer : la rédaction et l’orthographe.
a) Rédaction. – Un grand progrès a déjà été réalisé : les sujets sont devenus intelligents. On n’a qu’à accentuer cette évolution, dont nous nous félicitons. La meilleure preuve que cette épreuve est presque parfaitement adaptée, c’est que nos enfants, habitués à la rédaction libre, sont en général ceux qui réussissent le mieux cette épreuve au C.E.P.E.
b) Dictée. – Elle est une bonne épreuve de contrôle à condition qu’on cesse presque totalement de présenter les colles qu’évitent seulement ceux qui ont subi un entraînement méthodique et abrutissant.
Les dictées ne devraient contenir que des mots du langage enfantin. Des tolérances très larges seraient acordées pour les mots non du langage enfantin.
Il n’y aurait pas de note éliminatrice en dictée.
L’épreuve de dictée en question serait couplée avec celle de rédaction : 5/10 pour la rédaction, 2,5 /10 pour la dictée, 2,5/10 pour les questions.
Aussi l’épreuve écrite serait à la vraie place.
Compter : Le contrôle du C.E.P.E. devrait se borner aux techniques de base : addition, soustraction, multiplication, division, fraction, règle de trois, règle d’intérêt, etc.
L’épreuve de calcul actuelle entraîne un bourrage épuisant et très insuffisamment éducatif. Un problème, s’il n’est pas dans la vie, s’il n’est pas d’une compréhension pratique pour les enfants, reste une sorte de rébus, sans véritable portée éducative.
Nous demandons que l’épreuve de calcul comprenne un exercice ou une série d’exercices techniques sur les opérations essentielles du programme : addition, soustraction, multiplication, division, opérations diverses, fractions, intérêts, etc., 5 points sur 10.
2. Un problème à opérations multiples mais de compréhension facile, adapté le plus possible aux réalités quotidiennes, 5 points sur 10.
Nous estimons, en effet, qu’un enfant qui est maître de toute la technique du calcul, saura, s’il n’a pas été déformé par la scolastique résoudre ultérieurement les problèmes pratiques qui se présenteront à lui.
Lire, écrire, compter restent donc les acquisitions essentielles qu’on doit exiger de notre enseignement primaire. Quiconque les possède même si son savoir n’est pas d’autre part rigoureusement encyclopédique, est suffisamment lesté pour acquérir par la suite les notions et les techniques que la vie demandera de lui.
L’examen doit cependant tenir compte des connaissances accessoires secondaires, dont l’acquisition maximum reste cependant souhaitable.
Mais une trop grande place donnée à ces acquisitions risque de substituer à l’école à un savoir expérimental et pratique un savoir de mots sans valeur formative.
On pourrait, soit :
Avoir à l’écrit une épreuve spéciale, cotée sur 10, pour l’ensemble, et portant sur : géographie, 3,3 ; sciences, 3,3 ; histoire, 3,3 (en une ou plusieurs questions de chaque) ; ou bien, ce qui serait préférable, reporter à l’oral l’interrogation sur ces matières en même temps que les épreuves de musique, de chant, de diction et de gymnastique.
La part aussi réduite, faite aux épreuves de contrôle d’acquisitions générales éviterait les risques du bourrage verbal qui se pratique à l’école.

ÉCRIT

Une épreuve de lecture de compréhension muette ou écrite, cotée sur 10.

Une épreuve de langue avec rédaction simple, 5/10 ; dictée normale, 2,5/10 ; et questions, 2,5/10.

Une épreuve de calcul avec questions multiples, 5/10.
Opérations techniques, un problème compréhensible, 5/10.
Une épreuve de dessin libre ou non, ou coté au choix, 5/10.
  

ORAL

 Interrogation. – Lecture expressive, histoire, géographie, sciences, musique, chant, diction, gymnastique.

Au cas où les interrogations orales révèleraient des faiblesses susceptibles de motiver l’échec à l’examen, il sera tenu le plus large compte du carnet de scolarité et de l’opinion de l’instituteur pour la décision finale. L’essentiel de l’examen restant l’écrit, qui seul détermine souverainement la réussite ou l’échec.
Pour ceux qui croiraient que nous ne réservons pas à ces matières que nous repoussons à un oral décisif une place suffisante, nous répondrons que l’enfant de 12-13 ans aura encore le temps largement, d’apprendre dans les années à venir de sa scolarité, les notions d’histoire, les notions pratiques de géographie et de sciences. Ce n’est pas le plus ou moins grand bagage qui doit séparer les enfants de cet âge.
Nous devons nous en tenir aux acquisitions principales, qui ont toujours été le domaine de l’école primaire et réduire pratiquement à ces matières le contrôle opéré.
Il ne s’agit pas d’avoir avec les enfants de cet âge des ambitions démesurées. Nous avons appris à nos élèves à lire couramment et intelligemment, à rédiger correctement et sans faute, à calculer rapidement et sans erreur, nous les auront bien lestés par les travaux ultérieurs.
C’est ce que devra marquer le nouveau C.E.P.E.