Raccourci vers le contenu principal de la page

logo blog Pour une profonde action de pédagogie nouvelle en France, 1er novembre 1936

Un appel de Freinet aux adhérents pour participer activement au Groupe Français d’Éducation Nouvelle.

En rejoignant les chantiers de recherche sur des grands principes de pédagogie nouvelle.
En créant des groupes locaux pour intéresser les enseignants à l’Éducation nouvelle et à devenir, si ce n’est adhérents, au moins sympathisant à l’Imprimerie à l’École.

Dans ce numéro, propositions d’action d’un militant, Pouget, pour sensibiliser les parents à l’Éducation nouvelle.

 

 

 
La réorganisation sur des bases actives du Groupe Français d’Éducation Nouvelle
 
A l’occasion de mon voyage à Oslo, à l’aller, et deux semaines après, au retour, il m’a été possible d’assister à deux importantes réunions du Groupe Français d’Éducation Nouvelle.
La première avait pour but de demander au Comité d’action de se prononcer sur la nouvelle organisation proposée à Cheltenham et qui a été approuvée.
A l’avenir, le Groupe Français d’Éducation Nouvelle sera donc administré par :
– un Bureau parisien, chargé de la direction ;
– un Comité élargi comprenant les diverses personnalités pédagogiques qui, aux divers degrés et pour les divers enseignements, s’intéressent à la pédagogie nouvelle et aux réalisations du Groupe. Ce comité a voix délibérative.
– des représentants de toutes les organisations s’intéressant à l’Éducation nouvelle seront invités à titre consultatif aux réunions du Groupe.
Une grande campagne de propagande sera entreprise pour la constitution, à travers la France, de groupes locaux et départementaux d’Éducation Nouvelle, et pour l’adhésion au Groupe de tous ceux qui, à quelque titre que ce soit, s’intéressent à l’Éducation nouvelle. Le prix de la cotisation est de 5 fr. par an et donnera droit à un bulletin mensuel du Groupe dont le premier numéro sortira incessamment.
La deuxième réunion à laquelle assistaient plusieurs de nos amis a travaillé à mettre effectivement en marche l’organisme nouveau. Elle a tout spécialement étudié la possibilité de mettre immédiatement en chantier les recherches et les discussions sur les sujets susceptibles de passionner actuellement les éducateurs : suppression du C.E.P., éducation des anormaux, les journaux d’enfants, la liaison entre les divers degrés d’Enseignement, l’organisation des études entre 13 et 14 ans, les bibliothèques publiques, etc.
Le bulletin du Groupe donnera la liste complète des sujets d’étude préconisés avec les noms des responsables pour quelques-uns de ces titres. Il fera appel à tous les camarades que la question intéresse pour diriger l’étude de ces problèmes essentiels. Des questionnaires seront adressés aux journaux et organisations, des articles publiés dans les revues. Le rapport général et définitif sera enfin publié dans une collection des Brochures de l’Éducation Nouvelle auxquelles une grande diffusion sera assurée.
 
***
Le succès de notre mouvement est profondément lié à l’élargissement de cette action.
Nous avons constaté bien des fois que nous ne tenons pas à voir s’accroître à une allure accélérée le nombre des adhérents de l’Imprimerie à l’École. Nous sommes donc une organisation peut-être unique puisque notre préoccupation essentielle n’est pas le recrutement mais le travail pédagogique effectif.
Pour ce travail, nous sentons cependant la nécessité de créer une atmosphère favorable, de susciter des cercles amis, d’aider au mouvement d’Éducation nouvelle dont nous sommes une des branches les plus vivantes. Le Groupe d’Éducation Nouvelle créera cette atmosphère, ce climat favorable.
C’est pourquoi nous demandons tout spécialement à nos adhérents d’être partout dans leurs départements les meilleurs artisans de l’organisation nouvelle du Groupe. Adhérez tous, personnellement au Groupe français. Ce n’est pas la cotisation minime qui pourrait vous arrêter. Constituez ensuite dans votre ville, dans votre arrondissement, dans votre département, des Groupes d’Éducation Nouvelle adhérents au Groupe de Paris. Des instructions à ce sujet vous seront données sous peu.
Il vous suffira d’ailleurs d’imiter l’activité de nos filiales d’Eure-et-Loir et des Vosges dont nous avons parlé : par des expositions, des conférences, par l’organisation de cinémathèques et de discothèques, vous intéresserez à l’Éducation nouvelle des masses toujours plus grandes d’éducateurs. Et alors, si même les adhésions à l’Imprimerie ne sont pas nombreuses, nous sentirons au moins sympathie et appui.
Organisez des conférences. Je rappelle l’offre que j’ai faite de répondre à la demande que, pourraient me faire plusieurs villes ou même plusieurs départements pour l’organisation tous les mois ou tous les deux mois de tournées de conférences. Je reste à votre disposition.
Célestin Freinet
 
_________________________________________________________________


Pour l’Éducation Nouvelle, obstacles à briser
 
Pour que nous puissions travailler dans de bonnes conditions, il faut que le milieu soit moins ignorant et moins hostile à l’application des méthodes nouvelles.
Nous savons tous que, vis-à-vis de l’école, les parents ont encore, dans leur très grosse majorité, l’esprit farci de préjugés rétrogrades. Ils désirent qu’on enseigne leurs enfants comme ils ont été enseignés eux-mêmes. Ce qu’on fait à l’encontre du vieux système les hérisse.
Par l’intermédiaire des sociétés post-scolaires, nous ne pourrons atteindre qu’un nombre restreint d’entre eux. Et ce que nous pouvons faire quelquefois, occasionnellement, sur le terrain de l’action individuelle risque de ne pas être très fructueux.
Actuellement, nous assistons à une « mue » de l’esprit public. Les mouvements ouvriers de juin ont provoqué une fermentation, un bouillonnement d’idées qu’on n’a certes pas vu depuis longtemps.
Ne pourrait-on pas profiter de ce moment pour organiser une offensive de grand style dans les journaux acquis au Front populaire ? : Peuple, Humanité, Populaire, L’œuvre, etc. D’octobre à décembre prochain, par exemple, nous demanderions à ces journaux de publier une quinzaine d’articles. En principe un par semaine. En très bonne place. Avec titres attirants : « Tu me feras 50 lignes », « A bas le premier », pour critiquer par exemple, les punitions scolaires et les classements stupides. « Quand tu sortiras de classe, enferme-toi, assieds-toi e ne bouge plus », pour taper sur l’abominable chancre des devoirs à la maison.
Freinet grouperait dans un dossier, communiqué à ceux qui mèneraient la campagne, les témoignages des parents qui ont déjà été conquis, afin que ces témoignages enchâssés, soulignés, commentés obtiennent la plus large publicité.
Il faudrait naturellement obtenir l’assentiment préalable et l’appui actif d’une très grosse organisation : Ligue de l’Enseignement par exemple. Et aussi celui des journaux qui confieraient cette rubrique à des rédacteurs qualifiés.
Insertion de lettres critiquant ou approuvant, répliques des rédacteurs, tout cela entretiendrait bien l’intérêt des lecteurs pendant 9 mois.
Au bout de ce temps, on aurait certainement désarmé des hostilités… et nous pourrions occuper et organiser le terrain conquis.
Pouget
 

 

L’Éducateur Prolétarien, n° 3, 1er novembre 1936