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Les maths, un outil de sélection

Dans :  un niveau scolaire › 
Décembre 1976

 

LES MATHS, UN OUTIL DE SELECTION

 François Couturier, dans l’article ci-dessous, explique comment il tente de sortir du rôle de sélectionneur ; il exprime son désir de faire des mathématiques un réel outil de formation, d’ouverture ; il lance un appel à la relation d’expériences concrètes. Qui rendra compte dans ces pages de la sienne dans ce domaine ? La Brèche pourrait être un lieu d’échange sur renseignement de la mathématique. Lecteurs, à vos stylos !

 

Je démarre en mathématiques, en louvoyant au travers des contradiclions du type : j’oblige les élèves à rester assis six heures par jour et je voudrais développer leur autonomie.

 Les maths servent à sélectionner les gens. Je ne sors pas du rôle de sélectionneur, même si je le fais avec mauvaise grâce. Une simple impression. En donnant le plus possible des bonnes notes, certains élèves étiquetés “nuls en maths” sortent un peu de leur image.

 Officiellement les maths ne sont pas un outil de sélection. On dit que c’est une des matières qui servent à la formation de l’esprit. Mais que veut dire “un esprit formé” ?

 Michel Mangematin dans le numéro 340 des “Temps Modernes” en donne une définition :

 L’esprit formé est en général un esprit qui devant un problème réel (affectif, technique...) est capable :

 1. d’avoir une attitude de maîtrise de soi, de recul (et non de fuite, de crainte...) ;

2. d’autonomie : mise en oeuvre, individuellement ou collectivement des outils intellectuels permettant la maîtrise du réel ; initiative ténacité... ;

3. d’aller chercher soi-même des connaissances, de se les intégrer, de se changer par leur intermédiaire”.

 Il ajoute : “On peut se demander si l’enseignement des maths n’aboutit pas à l’effet inverse”.

 

J’accepte de faire des cours de maths en espérant pouvoir les faire dans le sens de la définition. Pour essayer de réaliser cela, je fournis beaucoup d’énergie pour créer un climat de confiance où chacun a droit à l’erreur, en particulier le prof. C’est peut-être aussi un moyen de faire tomber le prof du piédestal de celui qui détient la science. Je n’accepte pas qu’on se moque de quelqu’un qui dit une bêtise. J’accepte quelquefois de répéter quand les élèves discutent au moment de l’explication. Je ne valorise pas la belle solution.

 Devant les questions, le plus possible je renvoie les élèves à leurs documents (livre, cahier...) ou leurs camarades plutôt que d’apporter la réponse.

 Pour lutter contre le découpage en tranches : français, musique, histoire, T.M., maths, géo, techno... on essaie avec d’autres profs d’aller dans les cours des autres et d’harmoniser les langages. Pour l'instant, on balbutie à peine, mais ça vient.

 On vient de démarrer une correspondance. Ça a l’air prometteur dans plusieurs directions. En particulier dans celle du déblocage : des élèves qui ne faisaient pas grand chose se sont mis à travailler. D’autres expriment des problèmes personnels. C’est aussi un moyen de prendre conscience de certaines règles à respecter pour pouvoir communiquer.

 

P.S. Voici donc des impressions à ras de terre, des idées assez rebattues mais c’est avec ça que j’essaie de survivre. S’il y a des gens qui ont envie d’en causer par écrit ou oral, j’aimerais bien.

 

François COUTURIER, La Horde 39120 Chaussin