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Les instituteurs allemands

Janvier 1923

 

LES INSTITUTEURS ALLEMANDS

Revue CLARTÉ n°29 du 15 janvier 1923, pages 123 à 125

par G. * FREINET

 

Un de nos amis instituteurs, G.* Freinet, a su utiliser ses vacances de la meilleure façon. Il a été les passer dans l’école allemande de son collègue Siemss. Là, il a étudié sur place la structure et les méthodes de l’école primaire en Allemagne. Il a songé à faire bénéficier les lecteurs de « Clarté » et particulièrement notre public d’instituteurs et d’institutrices des enseignements très précieux, ainsi que de la documentation très précise qu’il a rapporté de son voyage.

(Les institutrices constituant un corps à part, moins important d’ailleurs, ayant un statut rigide, sont loin d’avoir les mêmes droits ni les mêmes traitements que les instituteurs).

 

FORMATION DES INSTITUTEURS

La formation des instituteurs est à peu près la même qu’en France. Le jeune homme qui se destine à l’enseignement étudie dans l’enseignement primaire, primaire supérieur ou secondaire jusqu’à 15 ans. À cet âge, il entre à l’École Normale, le « Praeparandum », où il reste 3 ans, jusqu’à 18 ans. Mais, alors qu’en France, nous sortons à ce moment-là avec le brevet supérieur, l’élève-maître allemand va faire encore trois ans dans le « Séminaire », jusqu’à 21 ans. Il en sort, après avoir passé un premier examen, correspondant à peu près à notre brevet supérieur. Il existe aussi un deuxième examen, correspondant à notre C.A.P. Mais les jeunes stagiaires sont dispensés de ce deuxième examen, si, après avoir constitué un « groupe de travail de stagiaires », ils ont suivi le travail de ce groupe pendant un certain temps.

 

L’ORGANISATION ADMINISTRATIVE DE L’ÉCOLE

Le cadre principal, comparable au cadre français, n’a guère été changé par la Révolution : directeurs (rektors), chefs d’école de la ville (nos inspecteurs).

Il faut, par contre, nous arrêter sur une innovation importante et que nous devons méditer : c’est l’établissement du Conseil des Maîtres dont on parle si souvent en France, et qui y a une si mauvaise presse. Le directeur d’une école, même importante — comme celle de notre ami Siemss (14 classes) — a sa classe comme les autres instituteurs (ordinairement la première). Le nombre d’heures est seulement réduit pour lui de 30 à 20 heures environ. Comment peut-il, sans gros supplément de travail, tenir tête à une si importante direction ?

1° On a d’abord déchargé le directeur de nombre de préoccupations, obsédantes chez nous, et qui, là-bas, sont le fait du… concierge. Ainsi, c’est le concierge qui, aux heures réglementaires, fait sonner le carillon, signal des sorties ou des récréations. Il s’occupe même de la fréquentation, comme on le verra plus loin.

2° On a organisé le Conseil des Maîtres, conquête de la Révolution. Le jour même où je visitai l’école, les instituteurs et institutrices furent convoqués par le directeur, durant une récréation, dans la salle du Conseil. Il s’agissait de traiter une question assez grave concernant le personnel de l’école. Après discussion, on nomma deux délégués chargés de se rendre auprès du chef d’écoles et de l’entretenir de l’affaire en question. Car le Conseil des Maîtres, qui a tous les pouvoirs de nos directeurs, est à peu près souverain à l’école. En principe, les pouvoirs spéciaux du directeur sont très réduits. C’est ainsi qu’il n’a pas le droit d’aller visiter une classe d’adjoint (exception faite pour les stagiaires) sans l’autorisation, ou mieux, l’ordre formel du Conseil des Maîtres.

Au Conseil des Maîtres est adjoint un Conseil des Parents. Cette institution marque une tendance nouvelle dans l’Enseignement, lequel n’est plus considéré comme l’œuvre exclusive des pédagogues, mais doit être le fruit de la collaboration des instituteurs et des parents des élèves. Le Conseil des Parents s’occupe des questions matérielles et pédagogiques. Malheureusement, comme toutes les assemblées populaires, il n’est pas toujours à la hauteur de sa tâche, parce que les hommes qui le composent n’ont pas assez de confiance en eux. Aussi, ces Conseils de Parents ont-ils un peu déçus leurs promoteurs, car il en est de cela comme du suffrage universel qui présuppose des « hommes » ne craignant en aucun cas de formuler leur opinion quelle qu’elle soit. Peu importe : la barrière est franchie. L’enseignement est sorti du cadre étroit de l’école. L’idée fera lentement son chemin et ainsi se prépare rationnellement l’école post-révolutionnaire.

Le système de self-gouvernement à l’école est étendu aux échelons supérieurs de la hiérarchie.

Il est institué dans chaque ville un « Conseil des Maîtres de la Ville », comprenant un délégué pour deux écoles. Ce Conseil assiste le chef d’écoles de la ville. Il peut faire toutes propositions concernant les écoles, ainsi que des propositions pour les nominations, notamment de directeurs. Il donne son avis sur le chef d'écoles. Il peut même demander son renvoi en cas de désaccord sérieux. Et ce ne sont pas toujours là des vœux platoniques, puisqu’un Conseil des Maîtres a réussi, à Berlin, à faire déplacer un chef d’écoles qui ne lui plaisait pas.

Un ou deux délégués par ville, suivant son importance, forment la « Chambre des Maîtres de Province » qui, à un degré plus élevé, a les mêmes attributions.

Au sommet, on instituera une « Chambre d’Empire », laquelle manque encore à la construction.

Comme on le voit, ce n’est pas là une conquête négligeable de la Révolution. Il est certain que l’œuvre même de ces divers Conseils est facilement entravée par un gouvernement de réaction. Mais, malgré tout, l’institution reste qui permet aux maîtres d’Allemagne de faire un apprentissage sérieux de l’école post-révolutionnaire.

 

SITUATION MATÉRIELLE DES INSTITUTEURS

Les fonctionnaires allemands ont été répartis en 13 catégories. Les instituteurs sont dans la VIIe. Avant la guerre, dans une ville d’importance moyenne, un instituteur touchait un traitement total compris entre 1720 marks (1-2 ans de service) et 4670 marks (au-dessus de 31 ans), chiffres qui me semblent placer ainsi l’instituteur allemand à un niveau notablement supérieur à celui de l’instituteur français.

Les traitements étaient, et sont encore classées par catégories suivant l’importance de la ville (A-B-C-D-E). Ou plutôt, ce ne sont les traitements qui varient, mais seulement les diverses indemnités afférentes. A partir de 1919, comme en France, on accorda une indemnité de cherté de vie. Et aujourd’hui, par suite de la baisse fantastique du mark, c’est le chapitre de cherté de la vie qui s’enfle constamment et qui maintient les traitements à un niveau, non pas suffisant, mais qui suit, du moins, de loin, l’augmentation déplorable du coût de la vie.

Les traitements de base vont actuellement de 20.000 marks (1-2 ans de service) jusqu’à 28.000 marks (après 16 ans). Donc, en somme, augmentation rapide et maximum de traitement de bonne heure — par comparaison avec la loi française.

A ce traitement de base viennent s’ajouter :

1° L’indemnité de résidence, variant :

a) Pour un même lieu, suivant l’ancienneté (de 5.600 à 7.200 marks, par exemple pour la catégorie A) ;

b) Suivant les villes : 5.600 marks (cat. A) contre 2.100 marks (cat. E).

2° La cherté de vie, variant aussi suivant le temps de service et l’agglomération.

L’indemnité de cherté de vie est aujourd’hui plus du double du traitement.

Ainsi augmenté des diverses indemnités, le traitement annuel d’un instituteur de grande ville allait, en août, de 57.980 marks (1-2 ans de service) à 77.660 marks (au-dessus de 16 ans). C’étaient là les traitements d’août. Depuis, ils doivent encore avoir varié, car, au cours du change (25 août), 77.660 marks (traitement maximum d’instituteur) valait 524 francs 20.

 

L’INSTITUTEUR AGRICULTEUR

Si, dans les villages, les instituteurs sont moins bien payés, chacun d’eux a les vaches et le pré que voulait nous attribuer M. Monicault. L’instituteur, là, est paysan. Mais, connaissant le métier, ayant l’instruction nécessaire, il est à la fois l’instituteur et le professeur d’agriculture. Il a des cultures et des ruchers modèles. La commune ne fait pas que de mettre à sa disposition le terrain nécessaire. Elle doit faire exécuter les gros travaux (labourage, semences, etc.), qui permettent ainsi à l’instituteur de se consacrer, malgré tout, et encore mieux à sa fonction.

 

INDEMMNITÉS RATIONNELLES

Il y a quelques innovations heureuses aussi, et que nous devons retenir, dans la distribution des indemnités aux familles.

a) On admet qu’un travailleur doit pouvoir nourrir sa femme, d’abord. Aussi accorde-t-on à l’instituteur marié, même sans enfant, 2.500 marks (barème du 1er juin 1922). Et cela doit bien aider pas mal de jeunes ménages.

b) En ce qui concerne les enfants, on applique un principe, tout à fait opposé au principe français. Chez nous, l’allocation pour enfant va en diminuant avec l’âge, pour s’éteindre de bonne heure (16 ans). Pour l’instituteur allemand, l’indemnité va en s’accroissant. Elle est de 4.920 marks pour chaque enfant jusqu’à 6 ans ; de 6.150 marks, de 6 à 14 ans et de 7.380 marks de 14 à 21 ans. Il va de soi que cette dernière allocation est supprimée si l’enfant gagne sa vie au lieu d’étudier ou d’être en apprentissage. C’est là un fait à noter et à donner comme précédent, quand nous demandons une mesure analogue.

Le système des retraites paraît plus souple qu’en France. La retraite n’est qu’à 65 ans et se monte aux 3/4 du traitement. Mais si le titulaire meurt à n’importe quel moment de sa carrière, sa veuve touche une pension de 40% du traitement et chaque enfant, s’il y en a, 1/5e de la pension de la veuve jusqu’à 18 ans. Dans le cas d’enfants orphelins, chacun d’eux touche 1/3 du traitement.

Voilà tout de même, ce me semble, un système qui peut être envié des fonctionnaires français qui, en prévision d’une mort prématurée, payent pour une pension viagère à une quelconque assurance.

 

L’ISOLEMENT PAR LE CHANGE

Mais la situation des instituteurs allemands, comme celle des autres travailleurs, est difficile. Par suite de la dépréciation constante de la monnaie de papier, les salaires et traitements ne suivent que de loin la cherté croissante de la vie. Nos collègues ont traversé des jours si tristes durant la guerre qu’ils s’estiment encore heureux de manger du bon pain de seigle. Ils ont appris à tout utiliser. Ils mangent encore ; tous les ouvriers ne doivent pas en faire autant. Mais acheter des costumes à 8 ou 9.000 marks, et mauvais, des souliers d’un prix semblable, des chapeaux, il n’en est pas question. Ils usent leurs vieux habits ; mais cela aussi ne peut durer. Dans ces conditions, on ne parle pas d’acheter des livres. On peut s’abonner à quelque publication pédagogique nationale ; mais le quotidien est trop cher. Et les journaux étrangers sont pratiquement prohibés (L’abonnement à L’Ecole Emancipée (1) coûtait, le 25 août, 2370 marks).

C’est à nous, travailleurs des pays à change relativement sain, à nous imposer le sacrifice nécessaire pour leur fournir le minimum de pensée indispensable au triomphe de notre Internationale.

 

L’ORGANISATION DES DIVERS DEGRÉS D’ENSEIGNEMENT : L’ÉCOLE UNIQUE

Pour la première fois, à la faveur de la Révolution, on essaya d’organiser l’Ecole unique en Allemagne. Mais ceci est une œuvre organisatrice de longue haleine, et le pouvoir prolétarien fut trop tôt brisé pour permettre l’achèvement de la réforme. Le premier acte fut accompli. On décida que tous les enfants devraient fréquenter l’école primaire, de 6 à 10 ans. L’importance et la portée sociale de cette mesure n’échapperont à personne. J’ai vu moi-même, dans une école allemande, des enfants pieds-nus, aux habits déchirés, au nez sale, voisinant avec des garçons rayonnants, aux mains blanches et aux souliers cirés. Et les riches n’étaient pas toujours les plus savants. Durant une leçon d’anglais, un de ces va-nu-pieds, qui fréquentait sans doute le port cosmopolite, levait sans cesse le doigt. C’est énorme, je crois, d’obliger tous les enfants à vivre ensemble durant 4 ans. À quand ce premier acte de l’école unique chez nous ?

On dit souvent : Mais les riches préfèreront envoyer leurs enfants dans des écoles libres qui connaîtront ainsi un regain de faveur. La loi allemande a prévu cette évasion, et, à partir de 1924 ou 1925, les écoles libres ne pourront plus recevoir les enfants au-dessous de 10 ans.

L’école unique est donc réalisée jusqu’à dix ans en Allemagne.

 

SELECTION NATURELLE

À partir de cet âge s’accumulent les difficultés. Ce qui fera comprendre que, seules, les villes « avancées » aient pu poursuivre utilement la réforme.

On admet qu’à partir de dix ans, l’enseignement, uniforme jusque-là, devait varier suivant les élèves. Quelle classification adopter pour l’orientation de chacun d’eux ? A Hambourg, notamment, où la réforme se poursuit, la classification se fit par les maîtres, assistés de psychologues spécialistes. L’un de ces spécialistes s’acquit une passagère renommée comme promoteur d’une classification par des « épreuves » écrites, consistant, par exemple, 5 ou 6 mots étant donnés, à faire rapidement une phrase correcte dans laquelle les mots seraient liés d’après un sens convenable.

On se basa encore sur d’autres données, d’après lesquelles Hambourg, par exemple, constitua plusieurs catégories :

Cat. A. Les élèves les plus intelligents étudiaient les langues, mortes ou vivantes, et devaient recevoir l’instruction dans des écoles spéciales.

Cat. B. Les élèves moins intelligents qu’on pousse encore, mais sans l’étude des langues.

Cat. C. Ce groupe d’une intelligence ordinaire qui devait constituer la grande masse des travailleurs est subdivisée en :

1° Une catégorie d’habiles ouvriers manuels, qu’on dirigeait plus particulièrement vers cette branche d’activité et qui devait faire de bons contre-maîtres.

2° Le restant des élèves qui s’instruit à l’école publique ordinaire.

Ces divers groupes d’élèves n’étaient jamais fermés et on avait prévu le passage de l’un à l’autre quand une aptitude nouvelle se révélait — ou inversement.

Mais toutes ces dispositions, à partir de 10 ans, ne sont guère que des projets, sauf dans de rares villes.

Nous allons voir les chemins qui s’offrent aujourd’hui à l’activité des écoliers des divers groupes.

 

L’ENSEIGNEMENT SECONDAIRE

L’École unique n’existe encore que jusqu’à 10 ans, puisque les enseignements secondaire et supérieur sont payants et que, partant, tout le monde ne peut pas en profiter. Ce vice est compensé en partie pour les fonctionnaires par l’allocation servie aux parents durant les études, jusqu’à 21 ans.

Donc, les plus intelligents qui peuvent se payer des études, et les riches, suivent l’enseignement secondaire donné dans les lycées. Ceux-ci diffèrent de nos établissements secondaires en ce que : 1° il n’y a pas d’élèves au-dessous de dix ans ; 2° il n’y a pas d’internat. Les élèves y étudient, comme en France, le latin, le grec et les diverses langues. A 16 ans, ils passent un « examen pour le service d’un an ». Plus tard, vient le baccalauréat. Mais l’enseignement secondaire paraît moins séparé qu’en France du primaire. D’une part, les professeurs (hommes ou femmes) n’ayant pas de poste dans l’enseignement secondaire (où il y a pléthore) peuvent enseigner comme instituteurs primaires. D’autre part, les instituteurs peuvent passer du primaire dans le secondaire sans être astreints à subir le baccalauréat (ceci depuis la Révolution seulement).

Le premier groupe de la catégorie C comprend des élèves moyens, mais avec de grandes aptitudes manuelles qui peuvent fréquenter, comme chez nous, des écoles primaires supérieures : « mitterschule ».

 

L’ECOLE PRIMAIRE PUBLIQUE

Venons-en maintenant au plus important : l’école primaire publique éduquant la grande masse du peuple.

L’enseignement primaire est obligatoire jusqu’à 15 ans. Et « obligatoire » semble être, moins qu’en France, un vain mot. La fréquentation est à peu près régulière. Sauf les cas de maladie, les élèves manquent rarement. D’ailleurs, à la première absence sans excuse ni permission, le concierge de l’école va avertir les parents. Si, malgré cela, l’élève ne vient pas, on envoie un agent de police pour le ramener. En cas de récidive, les parents — comme le dit la loi en France — sont poursuivis et condamnés à l’amende ou à la prison. Il est vrai qu’on paraît moins formaliste pour la tenue ; et ceux qui n’ont pas de souliers, viennent pieds-nus, naturellement.

Dans la campagne, la fréquentation est bonne aussi, surtout, me dit-on, du fait de l’état d’esprit des habitants, favorables à l’instruction.

Les questions de cantine n’existent pas, ou presque, parce que la classe finit tous les jours à 13 heures pour les grands, à 11 ou 12 heures pour les petits.

Pas de certificat d’études à la fin de la scolarité. Seulement une feuille sur laquelle sont marqués les notes générales pour les diverses matières : histoire, géographie, calcul, religion, etc.

 

L’ECOLE NOUVELLE D'HAMBOURG

Que deviennent, à 15 ans, les enfants qui ont quitté l’école ? Comprenant que le progrès nécessite l’instruction du peuple ; que cette instruction ne doit pas se dispenser seulement, durant le jeune âge, pour laisser ensuite s’étioler le bon grain semé ; et qu’il faut, par conséquent, envisager l’instruction :

1° de l’enfant ;

2° du jeune homme qui vient de quitter l’école ;

3°) de l’adulte ;

certains Etats se sont occupés sérieusement de l’instruction du peuple. Hambourg, ville riche par son port extraordinairement actif, et qui eut, à la Révolution, des Conseils d’ouvriers entreprenants, compte parmi ces Etats. Il a organisé des cours de perfectionnement qui accompagnent l’enfant jusqu’à 18 ou 20 ans. Ces cours ont lieu durant quelques heures par jour, prélevées sur le travail du jeune apprenti. Mais comme l’apprenti gagne ordinairement peu, cette mesure n’entraîne qu’un petit effort fiscal.

Mais l’Etat d'Hambourg a adopté un projet d’une portée plus considérable, et qui ne vise à rien moins qu’à l’instruction des milliers d’ouvriers. Ce projet prévoit la constitution d’une « Université du peuple », où tous les ouvriers viendraient, tour à tour, s’instruire durant un trimestre. Et l’Etat payerait à l’ouvrier ce trimestre de travail.

Voilà un projet d’une grande envergure, et qu’il n’est pas indifférent de connaître pour l’orientation de l’éducation du peuple, en France.

 

VERS UNE EDUCATION DU PEUPLE

Ainsi, si l’Allemagne elle-même n’a pas continué l’établissement de l’école unique et l’organisation de l’enseignement du peuple, quelques provinces du Reich décentralisé, ont remplacé ingénieusement l’initiative de l’Etat. Il était intéressant, notamment, de savoir comment Hambourg, qui, grâce au pouvoir passager de ses Conseils d’ouvriers, avait entrepris l’affranchissement de l’individu par l’école, travaillait à réaliser ce rêve essentiellement démocratique.

Nous avions parlé, il y a un an, dans l’Ecole Emancipée, de l’Ecole Nouvelle d'Hambourg, dont les maîtres, entrant franchement dans une voie nouvelle, essayent de libérer vraiment l’homme. Ces écoles nouvelles sont aux prises, actuellement, avec la réaction puissante. Elles vivront pourtant, par la foi et le zèle de leurs maîtres. Mais l’Ecole Nouvelle ne suffit pas, ou du moins, même existant réellement, elle ne peut produire un effet salutaire qu’à la deuxième génération. Il ne suffit pas de s’appliquer à libérer l’enfant jusqu’à 15 ans, si on le laisse ensuite reprendre par le terrible engrenage de la société actuelle. C’est pourquoi Hambourg, en attendant les lois d’Empire qui organiseront l’éducation du peuple, a entrepris cette grande œuvre dans toute son ampleur :

— Education rationnelle de l’enfant à l’Ecole Nouvelle.

— Maintien de l’influence de cette école chez l’adolescent.

— Education immédiate du peuple pour qu’il aide lui-même au succès de l’Ecole Nouvelle.

 

 

 

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Notes :

* L'initiale du prénom de l'auteur en haut de l'article comporte une erreur dans la version originale : Il est écrit G au lieu de C pour Célestin.

L'erreur est répétée dans l'introduction.

 

(1) Revue pédagogique hebdomadaire, organe de la Fédération de l'Enseignement, rue Fardeau, Saumur (Maine-et-Loire), étranger : 16 francs

 

Le texte ne comporte pas d'illustration.