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S.L. : les mots lui plaisent, c’est une notion derrière laquelle il expérimente, avec deux classes, mais pas de la même manière.
C’est comprendre qu’on peut travailler des choses différentes en même temps dans une même salle : les projets personnels ou imposés pour les enfants qui paniquent et ont besoin d’être guidés.
Il a envie d’entendre nos expériences pour voir ce qu’il peut transposer.

S.P. y voit l’opposé dans ces deux mots.
Quand il pense à autonomie, pour ses élèves collégiens bridés sans liberté ni à droite ni à gauche, tellement conditionnés, qui ont besoin d’entendre qu’ils ont le droit de se lever pour aller vider leur taille-crayon, puis quand ils le comprennent, comment faire en sorte qu’ils n’en profitent pas pour parler avec tous les enfants au passage, ne se lèvent pas au pire moment du temps de classe ? …
En informatique, il leur a demandé de créer un jeu sur scratch par équipes sans qu’un élève prenne tout en main et que les autres regardent. Comment leur apprendre à être autonomes ?

E. : souvent en conseil coopératif, ils émettent le désir de petits projets, mais matériellement par manque de temps ils n’arrivent pas à les mettre en œuvre.

S. : ils ont parfois aussi des idées auxquelles ils ne croient pas eux-mêmes.

E. : peut être peut-on les aider en leur permettant d’expliciter les étapes, les guider.

B. : le projet peut être considéré comme le travail lui-même, ce n’est pas forcément une chose à faire en plus.

E. : il paraît que l’autonomie s’enseigne, se travaille, s’apprend.

P.H. : il y a vraiment des mots clés très à la mode et justes : explicite, implicite.
Le collège est fait pour des enfants qui ont l’implicite de se lever sans faire de bruit…
La dimension explicite n’est pas évidente pour tous.
Il peut y avoir les différents temps écrits au tableau, avec des pastilles de couleurs, selon les possibilités de déplacement en fonction du moment de classe.
Par exemple on ne peut pas se lever ou aller aux toilettes pendant la présentation d’un camarade.
Il existe un formatage du comportement.

S. : lui, collégien, n’aimait pas le travail de groupe, où il y avait souvent un qui prenait les choses en main, deux qui donnaient un peu leur avis pas forcément suivi, un autre totalement à l’écart.

E. : quelles solutions y apporter ?

A. : les groupes sont contraints d’agir en autonomie parce qu’ils doivent accomplir des tâches seuls.
Pour les exposés, la seule contrainte est d’être à deux.
Cette année ils réalisent des projets à plusieurs (projet de la maitresse, ce qu’elle regrette un peu), où ils travaillent sur la région, et se sont répartis les rôles, suite à une réunion coopérative après s’être rendu compte que ça ne fonctionnait pas quand tout le monde cherchait la même chose en même temps.

S. : tu les a laissés se planter, pour qu’ils voient qu’il y a nécessité de s’organiser.

A. : c’est pour ça que ça prend du temps.
Ça a été pareil pour le bruit et pour les toilettes. Au départ ça a été le défilé, des enfants, mais elle aussi, ont posté dans la boite (du conseil) qu’il y avait trop de va-et-vient et ça s’est régulé.
Pour le bruit, elle a d’abord proposé un système avec des sanctions, puis a présenté un feu tricolore (vendu chez Charlemagne, avec réglage des niveaux de bruit) qui sonne si le niveau sonore est trop haut (réglage possible du maximum autorisé) avec l’objectif de ne pas le faire sonner.

S. : ce qui peut marcher avec une classe peut ne pas marcher avec une autre.

B. : ça a marché parce qu’elle ne l’a pas sorti dès le départ et a attendu que le problème se pose pour pouvoir le régler avec eux.

P. : avec toujours l’idée en tête que tu es garant-e de la sécurité.

A. : tout ce qui a été discuté en réunion a fonctionné parce que c’est venu d’eux.

P. : en conseil ils ont fait émerger tout ce qui leur fait envie pour travailler.
Ce qu’elle ne sait pas faire, c’est graduer, avoir un système qui le permette. Soit ils ont des droits, soit ils les perdent.
C’est P. qui décide de la durée des sanctions, car elle a besoin que ce soit très réactif.

A. : est-ce que ce n’est pas trop direct ?
Comment fait-on pour ne pas s’y perdre ?

P. utilise une ardoise où elle écrit le nom de ceux qui gênent.

S.L. : c’est difficile d’accepter que ce qui marche dans la classe d’à côté avec E. ne fonctionne pas avec lui parce qu’il est différent.

S.P. se souvient d’un système de sanction par les pairs lors des conseils, ça légitime plus la sanction, ce n’est pas un pouvoir arbitraire.

S.L. : oui, si le groupe est bienveillant, qu’il ne va pas y avoir de sadisme délicieux…

S.P. : les demandes de sanctions des élèves étaient souvent les plus dures et les adultes « adoucissaient ».

A. utilise des ceintures d’autonomie et de comportement, ils se basent surtout sur « je ne gêne pas plus de 4 fois » et « j’ai fini mon plan de travail ».
Ils observent et le président demande : « de qui voulez-vous qu’on parle ? ».
C’est différé et ça marche bien à part le fait qu’il y a trop de critères pour attribuer les ceintures.

P. et N. ont beaucoup de mal à gérer ça. P. ne se souvient pas de qui a gêné pendant la semaine.

S.L. : plutôt qu’arriver avec un système tout prêt, le créer au fur et à mesure, en fonction de chaque classe.
L’adulte propose la structure, pose le cadre sécurisant. Il est en cours d’expérimentation sur une classe de sixième, où il y a un groupe d’enfants avec des difficultés diverses.
Il y a un livre de parole (qui sert de bâton de parole), si tu gênes trois fois tu es en dehors du cercle et tu n’interviens plus.

P. a travaillé pendant un mois sur une présentation à aller faire aux maternelles.
C’était son projet au départ puis les enfants se le sont approprié.
Ça a été dirigé mais ça leur a donné les clés pour travailler les exposés.

A. : pour les exposés, quand ils recherchent sur internet, elle leur demande de commencer par se poser des questions et de partir de là.
Elle leur demande d’écrire le minimum sur l’affiche où il y a aussi des images, avec d’autres choses à dire, et qu’il y ait aussi quelque chose à faire (questionnaire, texte à trous, image à compléter...).

S. : en 5e, pour leurs projets, les élèves vont chercher sur internet. Il leur dit : « Il y a une infinité de données qu’il faut transformer en informations. »

F. : Virginie montrait aux enfants qu’elle pouvait modifier un article Wikipedia, qui est fait par des humains qui écrivent.

 

Digression sur la semaine de la presse à l’école, l’analyse de la publicité.

 

P. : quand il y a un enfant qui a envie de faire un exposé, il vient en parler aux autres qui lui posent leurs questions et il part de ces questions pour ses recherches.
Il y a des questions qui n’ont pas de réponses, et ces questions permettent de mettre en place un plan.

N. : on peut coupler les questions propres à celui qui se charge de l’exposé et les questions des autres, parce qu’il a aussi besoin de répondre à ses propres questionnements et que parfois certains éléments essentiels sont oubliés.

A. : il y a ce qui est écrit et ce que l’enfant dit, puis ce qu’il sait parce qu’il est devenu expert (ou paraît expert, ce qui améliore l’estime de soi). Il y a au maximum deux exposés par semaine.

S.L. : parfois on culpabilise d’imposer.
S’il y a une attitude bienveillante derrière, on peut imposer un cadre, sécuriser.

P. : c’est complètement différent de les avoir un an, ou sur plusieurs années, ou dans une école avec un certain fonctionnement...

S.P. : la difficulté supplémentaire est qu’il y a plein de cours et de choses qui se sont passées entre deux fois où ils travaillent ensemble.
S’il veut instaurer un truc qui dure 3 heures, ça signifie une semaine avec eux.

N. : dans ses classes, une camarade du collège prenait quelques minutes en début de chaque cours pour rappeler où ils en étaient arrivés (bilan fait par elle ou par un élève).

P. a prévu un temps de classe hebdomadaire « projets ».
Ils ont une fiche sur laquelle ils écrivent le titre de leur projet, le matériel nécessaire, le nombre de séances.
Ça se réajuste au fur et à mesure. Ils peuvent maintenant s’inclure dans le projet d’un copain.
Ceux qui n’ont pas de projet sont en travail individuel. Cela a permis à un enfant d’entrer dans l’écrit pour pouvoir faire ses projets de bricolage.

S.L. évoque les E.P.I. (Enseignements Pratiques Interdisciplinaires) qui ont été imposés pendant un an, pour permettre aux professeurs des collèges de travailler en équipe.
Mais ce n’était pas un projet d’élèves et ça donnait lieu à un oral noté pour le brevet.
Il a travaillé sur les uchronies, utopies négatives avec revisitation de l’histoire, à partir du livre le Maitre du Haut Château de Philip Kindred Dick. Ils devaient écrire une nouvelle, ça a été très difficile pour tout le monde.

S.P. : au niveau du travail en groupe, on a des enfants qui n’ont pas l’habitude de travailler en groupe, et ce sont eux qui deviennent profs.

N. : les conditions d’infantilisation au collège ne favorisent pas non plus l’autonomie.
Son collège de secteur recrute des enfants venant de trois écoles avec des classes à plusieurs niveaux qui ont l’habitude de travailler en autonomie.
En sixième, on leur impose des toilettes sans papier ni verrou, on ne leur permet plus de prendre des initiatives.

A. : quand ils font un projet, ils y travaillent dehors, ils sont seuls.
Ils ne veulent tellement pas te décevoir qu’ils respectent les règles.

E.C. : les élèves de la classe coopérative (de son collège), en se répartissant les rôles, ont géré les trois heures de cours de la semaine où elle était en stage pour des conférences à l’ESEN (École Supérieure de l’Éducation Nationale).
Elle se demande pourquoi ils ne font pas transmettre aux enseignants ce que les inspecteurs/ formateurs/conseillers apprennent dans ces formations.
Ils attendent que ça monte des enseignants et les enseignants attendent que ça descende par infantilisation.

P. : en élémentaire, on est moins soutenu.
Les enseignants ne se considèrent pas comme des experts, des chercheurs.

S.P. : parce qu’il y a moins le sentiment du besoin de nouvelles pédagogies, qui n’est pas conscient.
Nous sommes pourtant des cadres A de la fonction publique.