Anne-Marie Milon Oliveira présente ici la nouvelle situation dramatique au Brésil qui a aussi de sérieuses répercussions dans le domaine de l'éducation.
La France est bien loin du Brésil où je vis, mais notre combat est le même dans ce monde globalisé, quoique encore plus brutal dans ce pays où la police tue autour de 1500 personnes par an, dont beaucoup d´innocents. Ces victimes sont en grande majorité des jeunes noirs, les principaux « suspects » désignés par un racisme enraciné dans la mentalité de la classe dirigeante depuis la colonisation et par 300 ans d'esclavage.
Une nouvelle loi du gouvernement au pouvoir depuis janvier en est l'exemple : le ministre de la justice veut exempter de culpabilité les policiers qui tuent « sous le coup de l´émotion ». Ils n´auront pas besoin de se justifier. L'année dernière, la police a tué un bébé près de naitre dans le ventre de sa mère. Celle-ci a survécu par miracle. Cette photo représente le père portant le cercueil de son enfant lors de l'enterrement.
Début mai, le gouverneur de l'État de Rio a pu se prendre pour Rambo et s'adonner à un nouveau sport policier : mitrailler les favelas à l´aveuglette depuis un hélicoptère. C'est ainsi que l´appareil à bord duquel il était en compagnie de policiers a « arrosé » un lieu de prière d´une religion évangélique. On lui avait dit qu´il s'agissait d'un repaire de trafiquants, mais comme la police ne possède pratiquement pas de services de renseignements, cela n´avait pas été vérifié. La rumeur suffisait. Par bonheur, il n'y avait personne au moment de l'attaque.
Mais les habitants d´une très grande favela de Rio (Maré) n´ont pas eu la même chance : 11 personnes, innocentes ou non, ont été tuées de la même manière. La peine de mort a été abolie au Brésil depuis 1988, mais elle est en vigueur plus que jamais. Comme dit un adage populaire: la police tue d´abord et pose des questions après.
Les violences policières qui ont frappé la France lors de manifestations de Gilets Jaunes sont de même nature, quoique bien moins brutales, pour le moment.
Le gouvernement de Bolsonaro veut supprimer les sciences humaines et sociales de l'enseignement secondaire ainsi que des universités publiques. Il faut reconnaitre, dit-il, qu´elles sont inutiles : l´université doit former la main d´œuvre nécessaire au marché du travail. Comme l´a dit un des leaders de l´opposition, Guilherme Boulos, l´éducation consisterait, selon le gouvernement, à développer des rouages efficaces pour les entreprises, un point c´est tout.
Les universités publiques qui étaient devenues accessibles sous Lula à un grand nombre de jeunes pauvres sont « dangereuses », source d´ennuis, car c´est là que l´on étudie et approfondit les racines du fonctionnement de la société. Les sciences humaines et sociales, « un luxe », ne seraient donc plus dispensées, selon le ministre de l´éducation, que dans les universités privées, à qui pourra se les payer. Mais le non-dit, là où le bât blesse, n´a pas seulement trait au « marché » du travail : les universités publiques sont un des principaux espaces ou peut encore s´organiser la résistance à la barbarie.
Sur sa lancée, le gouvernement a donc décrété le blocage de 30 % des crédits destinés aux universités publiques. Elles ne font, selon son ministre de l'éducation (Abraham Weintraub), que de la « pagaille » et c´est pourquoi, toujours selon ses dires officiels, il n´est pas juste que les citoyens payent des impôts pour l´enseignement supérieur public. Il fait ici d´une pierre deux coups, car la Banque mondiale recommande fortement que l'enseignement supérieur soit privatisé dans les pays comme le Brésil.
Bolsonaro a ajouté, lors d´une interview à un site de droite, que la recherche scientifique dont a besoin le pays est presque complètement absente des universités publiques. Traduction :
« Et en ce qui concerne les universités, si on considère la question de la recherche, peu d´universités produisent de la recherche et parmi ces quelques-unes, la plupart sont privées, comme Mackensie avec (ses recherches sur) le graphène. »
https://www.jornalcidade.net/video...em...radio-jovem-pan/58715/
Il faut donc être « cohérent ». Le ministre de l´éducation vient d´annoncer l´annulation à partir de maintenant de milliers de bourses ou de subsides destinés à la formation de chercheurs.
Or selon un rapport du bureau de recherche américain Clarivate Analytics, peu suspect de "gauchisme", financé par le gouvernement brésilien dès 2014, les universités publiques brésiliennes ont été responsables entre 2011 et 2016 de plus de 250 000 publications sur la base de données Web of Science et occupent la 13e position dans la production scientifique globale d'un ensemble de 190 pays.
Toujours selon le même rapport, la recherche est essentiellement universitaire au Brésil et concerne les universités publiques à plus de 95 %. Celles-ci ne se limitent pas à l´enseignement et ont officiellement pour mission trois grands domaines reliés : la recherche, l´enseignement et l´enracinement dans la société par le biais de programmes concrets auprès de populations en difficulté. J´ai moi-même participé à l'un d'eux, le Programme national d´enseignement dans les communautés de la Réforme agraire (PRONERA), et j´ai beaucoup appris au contact de trois de ces communautés situées dans la région de Rio de Janeiro et où notre action concernait la formation de moniteurs d'alphabétisation dans le sens large du mot. L'enseignement de Paulo Freire, basé sur la conscientisation, allié à celui de Freinet, nous a été précieux.
Un nombre très minime d´universités privées font aussi de la bonne recherche, mais la plupart se limitent au « marché de l´enseignement supérieur » en liaison avec le « marché du travail » (formation du « capital humain »). Il faut ajouter que la plus grosse entreprise mondiale de vente d´enseignement supérieur, Kroton, est brésilienne.
Le gouvernement veut donc priver de crédits et, si possible, privatiser les universités publiques, ce qui en interdira l´accès aux plus pauvres, que les gouvernements Lula et Dilma avaient inclus grâce à une politique de discrimination positive assortie de bourses à l´entrée en faculté. J´ai moi-même eu affaire à ces étudiants provenant de favelas de Rio, étudiants-travailleurs, étudiants du soir, en tant qu´enseignante à la faculté de Sciences de l´Éducation de l´Université d´État de Rio de Janeiro. L´univers qu´ils apportaient dans nos cours était d´une grande richesse... nous sortions de la théorie pure pour entrer dans le réel théorisé. Bon nombre d´entre eux me déclaraient qu´ils étaient les premiers de leur famille à avoir accès à l´université. Certains témoignaient que leurs parents ne savaient ni lire ni écrire.
C'est ce que la privatisation progressive des universités publiques va supprimer. L'argument principal est que l´argent économisé sera destiné à l´enseignement fondamental public qui se trouve, il est vrai, dans un piteux état. Or le gouvernement Bolsonaro vient aussi de baisser fortement les crédits destinés à l'enseignement fondamental et à l'enseignement technique. Il est clair que le non-dit, l'argument idéologique, est le principal argument. L'université ne serait qu´un antre de « gauchistes » dont le but principal serait l'implantation au Brésil du « marxisme culturel » et du « globalisme communiste » qui « dominent en grande partie le monde ». Ne me demandez pas ce que signifient ces termes, comme ce gouvernement ils relèvent en premier lieu de la psychiatrie. Le pays est en effet gouverné par une coalition inédite de fous (évangéliques pentecôtistes + militaires + Chicago boys) ayant à leur tête un halluciné total. Halluciné et habité par des désirs de violence, comme son projet de libération totale du port d´armes qui ne va pas manquer de produire son lot de massacres, mais qui va remplir de satisfaction les industries d'armement qui ont financé sa campagne.
Je souffre de voir à quel point le Brésil, l'Amérique latine, sont absents des médias français. On n'y trouve que la guerre civile qui frappe le Vénézuela, organisée à l'origine par les États-Unis pour mettre la main sur les réserves de pétrole de ce pays, les plus importantes de la planète. Maduro s´y prend mal, il est vrai, mais on se demande ce qu'il pourrait faire devant le blocus impitoyable organisé par les USA contre son pays depuis plusieurs années.
Quant à nous, on vit ce que décrit un courant littéraire sud-américain illustré notamment par le colombien Gabriel Garcia Marquez, auteur de Cent ans de solitude, et ici au Brésil par Érico Veríssimo (Incidente em Antares). Ce courant a dépeint sous le nom de « réalisme fantastique » un mélange surréaliste de réel souvent cruel et d´incroyable. Dans l’éducation, en particulier, le plus important pour le pouvoir en place n´est pas le manque dramatique de moyens et d´enseignants, mais d´en finir avec « l'endoctrinement gauchiste » des enfants qui n´a jamais existé. Les institutrices de l´enseignement primaire, en majorité des femmes très mal payées, ne savent même pas de quoi ils´agit. Le plus urgent est d'inculquer aux enfants la doctrine des pasteurs pentecôtistes millionnaires qui ont grandement contribué à la victoire de Bolsonaro. À voir un « Envoyé Spécial » remarquable diffusé en novembre 2018 sur France 2 : « Brésil : Dieu a voté. » https://www.youtube.com/watch?v=_nTWNOkAZMY
Il y a une autre référence vidéo, plus ancienne mais dont nous sentons de façon très cruelle le caractère inéluctable. Il s´agit d´un excellent programme d´Arte, transmis à l´époque du coup d´état contre Dilma (2016). Il montre de façon tout à fait saisissante le coup d'envoi de la chute qui allait plonger le Brésil dans l´horreur, dans un inconnu dépassant toute imagination. Le programme intitulé « Brésil : le grand bond en arrière » (https://www.youtube.com/watch?v=JMylpwqqGBA) inaugure de façon saisissante le récit de ce grand roman d´horreur que vivent les Brésiliens, épisode par épisode.
Il ne faut pas méconnaître cette dimension du drame que vit le Brésil : il a débuté par un coup d´état destiné à renverser la présidente Dilma Rousseff, démocratiquement élue. Le fait qu'elle ait été innocentée depuis par la justice suprême de toute corruption ne l´a pas réhabilitée aux yeux des putschistes et de leurs électeurs. Comme dans une sinistre Novela de la TV Globo, le principal média brésilien, les épisodes se sont enchainés jusqu'à l´emprisonnement sans preuves de Lula après un procès ridicule, que des « délations récompensées » ont permis de « justifier » grâce à des millions de fake news et beaucoup de dessous de table. Le principal objectif de ce procès était d'interdire à Lula de se présenter à l´élection présidentielle de novembre 2018. Tous les sondages, en effet, le donnaient gagnant dès le premier tour. L'usage de smartphones est très répandu au Brésil et les fakes les plus cruelles, les plus absurdes, ont été bombardées par millions grâce à des « moteurs » informatiques financés illégalement par de grandes entreprises, avec la compétente collaboration de Steve Bannon (ex-administrateur de Cambridge Analytica, qui avait montré auparavant ses « talents » lors de l’élection de Donald Trump et du Brexit).
Cette élection a donc été largement préparée par ces fake news qu´un peuple privé d'instruction n'a pas su identifier comme telles.
Il faut ajouter la mise en scène mélodramatique du jugement de Lula, largement diffusé par les médias et surtout par la chaine Globo. Le juge qui l'a condamné (de l'aveu de l´avocat général) n'avait pas de preuves, mais il est devenu un véritable héros national, celui qui allait liquider pour toujours la corruption généralisée dont Lula était le principal artisan. Ce juge, Sergio Moro, a été démasqué par les révélations récentes d'un blog (The Intercept) dirigé par le journaliste Glenn Greenwald, prix Pulitzer de journalisme, rendu célèbre pour avoir publié les révélations d'Edward Snowden. Les révélations en question, des dialogues transmis sur Instagram, montrent une étroite collaboration du juge Moro avec l'accusation dans le seul but de faire condamner Lula.
Interdire le retour de la gauche au pouvoir visait un autre but, non avoué : permettre aux États-Unis de s'emparer des réserves phénoménales de pétrole en eau ultra-profonde, découvertes sous le gouvernement de Lula, dont la valeur est encore incalculable. La compagnie d'État Petrobras s´était montrée parfaitement capable d´exploiter ce pétrole, depuis l´extraction jusqu'à la vente, mais on est en train de la brader pour « une peau de banane », comme on dit au Brésil, aux compagnies étrangères (dont Total, qui avait commencé à détruire la barrière de corail de l'embouchure de l'Amazone).
Il faut bien admettre que c´est beaucoup plus facile et économique pour les États-Unis de prendre leur pétrole en Amérique latine (leur « backyard », comme l'a déclaré expressément le vice-président américain) que de l´importer à grands frais du Moyen-Orient instable et lointain.
À voir aussi sur ce sujet, pour qui comprend le portugais, l'interview très récente de Lula, emprisonné depuis un an sans preuves dans le seul but de l´empêcher de concourir à l'élection présidentielle. (Après sept mois de luttes judiciaires interminables, deux grands médias, l'espagnol El Pais et le brésilien Folha de São Paulo ont pu l'interviewer dans sa prison.) https://www.youtube.com/watch?v=fdVRdNBuoHA&t=37s
Je ne peux omettre cette dimension du drame que vit le Brésil : le coup d´état qui a renversé la présidente Dilma Rousseff (innocentée par la justice) et l´emprisonnement de Lula après un procès ridicule mais que des millions de fake news bombardées avec la compétente collaboration de Steve Bannon (ex-Cambridge Analytica) ont permis de « justifier ».
Il faut dire, ce que les médias n´ont absolument pas montré ici au Brésil, que le prestige de Lula est resté très grand auprès d´une grande partie de la population, parmi ceux qui se comptent par dizaines de millions et dont la vie à changé grâce aux politiques qu´il avait mis en place et que Bolsonaro s´efforce de détruire. Près de 40 millions de Brésiliens s´étaient mis à pouvoir prendre, comme Lula le souhaitait, trois repas par jour !
Ces Brésiliens lui écrivent. Je connaissais l´existence de cette correspondance à un prisonnier, mais j'ignorais les détails de cette énorme production épistolaire. Sur un peu plus d´un an, il s'agit en fait de dizaines de milliers de missives. La moyenne à ce jour est proche de 100 par jour.
Le paradoxe est que j´ai pris connaissance de façon bien plus approfondie de ces lettres sur un site français, le site des « Détricoteuses » de Médiapart, quand un de ses programmes, intitulé « Cher Lula: Lettres à un prisonnier politique » a invité le 7 mai 2019 la chercheuse Maud Chirio, spécialiste de l'histoire du Brésil contemporain. Celle-ci explique en détails les circonstances dans lesquelles elle a fait cette découverte. Suit un excellent entretien disponible sur la chaine YouTube des Détricoteuses. https://www.youtube.com/watch?v=87NJSdDs3K8
Voici la présentation que ce site en fait :
Depuis son incarcération le 7 avril 2018, l’ancien président Lula reçoit des dizaines de milliers de lettres qui clament leur reconnaissance, offrent leur solidarité, revisitent le passé ou la période politique actuelle. Ces lettres sont la voix d’un Brésil qu’on n’entend pas, des petites gens le plus souvent. Maud Chirio, qui contribue à faire découvrir ce fonds original, répond aux questions de Laurence De Cock et Mathilde Larrère.
Maud Chirio et plusieurs autres historiens, brésiliens et français se sont alors consacrés au travail de mettre en lumière ce qui constituera, certainement, un corps de recherche fondamental pour les historiens, pour les chercheurs en sciences politiques et humaines en général sur la période actuelle vécue par les Brésiliens, période qui s´inscrit, il faut le dire, dans une géopolitique qui concerne tous les pays de la planète.
Son importance unique est de donner vie à la voix des « sans-voix » et à cette lecture, on peut constater toute l´affection que porte le petit peuple à celui qui a été emprisonné sans preuves, uniquement pour ne pas pouvoir concourir aux élections présidentielles de novembre 2018 qu´il aurait surement gagnées.
Le premier soin de l´équipe de Maud Chirio a été de numériser ces milliers de documents qui sont réunis à l'Instituto Lula de São Paulo afin de les protéger. En effet, compte tenu de la situation politique actuelle, ils n´étaient pas à l´abri d´une descente de police intempestive, voire même de la destruction. Un site en plusieurs langues intitulé Linhas de Luta (« Lignes de combat ») a été créé où ces lettres pourront progressivement être consultées : http://www.linhasdeluta.org/fr/index.php
C´est à leur lecture et sous le coup de l´émotion que j´ai décidé de traduire un tout petit exemplaire de cette correspondance. Elle provient de Palmópolis, petite commune de l'état de Minas Gerais.
Rédigées par des personnes en difficulté avec l´écrit, elles ont été dictées à une « écriveuse », comme on désigne populairement au Brésil les écrivains publics. C´est elle qui se présente dans la première lettre. Les noms de leurs auteurs ont été supprimés pour qu´ils ne soient pas inquiétés. Le tutoiement qui y est la règle montre bien la familiarité et l´affection dont jouit l´ex-président : il est l´un des leurs.
La religiosité propre au peuple brésilien se reflète dans ces lettres et même l'incroyant peut percevoir à quel point ce qu´elle exprime est significatif.
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Comme tu l'as bien dit, ami Lula, « On ne peut emprisonner les rêves. » Au moment même où je t'écris cette lettre, nous réalisons une Assemblée du Syndicat des Travailleurs et Travailleuses de Palmópolis. Je suis à la disposition des compagnons et des compagnes qui voudraient t´écrire, à toi notre cher Président.
J'espère que tu es serein et revigoré sur le plan spirituel. Je sais qu'il n'est pas facile d'endurer ce que tu endures, mais nombreuses sont les prières que fait pour toi le peuple que tu aimes.
J'ai suivi de près ton injuste saga, j'ai pleuré, je me suis irritée, mais je vois maintenant que c´est à nous de continuer ton « projet de vie », ou tout au moins, de lutter pour qu´il se réalise. Sois fort, ami, que l'Esprit Saint soit ta force. Ma famille t'aime et te serre bien fort contre son cœur.
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Lula, je suis très meurtrie de te voir en prison. Mais je prie tous les jours pour toi, pour que tu en sortes. On doit remercier tout d´abord Dieu et ensuite te remercier toi qui a retiré le Brésil de la misère. Tu as fait disparaître les mendiants du marché. J´y vend des bananes plantain, du fromage, de la farine de manioc tous les samedis et c'était plein de mendiants. Ensuite, il y a eu les retraites (attribuées) au bon moment, le Bolsa Família (Allocations Familiales). Plus personne n´a eu besoin de partager, chacun a eu sa quotte part. Je vote pour toi avec les dix doigts autant de fois que tu en auras besoin. J´ai 67 ans.
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Mon ami très cher, je te remercie parce qu’aujourd’hui je peux donner à manger à mes enfants. Sinon, je les aurais déjà perdus à cause de la faim. Merci [larmes], je te remercie beaucoup.
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Cher ami Lula, je travaille sur une propriété agricole de ma famille. J´habite la campagne et je te suis reconnaissante car je bénéficie du programme « Électricité pour tous ». Que Dieu te donne beaucoup de patience et de santé pour que tu sois libéré et que tu puisses revenir parmi nous. Accepte que je t´embrasse.
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Je suis très triste de te voir dans cette situation car tu as soulagé la faim de beaucoup de gens avec la retraite, le Bolsa Família et tout ce qui nous a aidés. Ce que je veux, c'est que tu sortes de là, je sais que tu es très triste et nous encore plus. Quand tu sortiras, nous ferons la fête : moi, ma famille, mes amis car nous t´aimons tous. Tous les jours j´allume la télévision pour voir si on parle de toi et je demande à Dieu qu´il te tire de là. Nous voterons pour toi à nouveau, autant de fois que tu seras candidat nous voterons.
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Je suis très triste de te voir en prison. Mon désir est que tu sortes de là afin de pouvoir nous aider à nouveau. Tu as été tellement bon ! Je prie pour que tu sortes de là. Tu as été comme un second père pour moi car j'ai une retraite et c´est grâce à toi. J´ai 78 ans et je te remercie beaucoup. J´ai déjà voté pour toi et je voterai autant de fois qu´il le faudra.
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Si j´écris, c´est parce que je veux que tu sortes de là au plus vite. Même les enfants t'aiment beaucoup. Je te [erreur]… Pardon : je te souhaite plein de bonnes choses, que Dieu te bénisse car tu ne méritais pas d´être en prison mais plutôt en liberté. Tous mes petits-enfants souhaitent que tu sois libéré, aucun d´eux n´a aimé ce qui s´est passé, ils ont tous été très en colère. La souffrance du peuple a augmenté. J´ai 75 ans, j´ai connu la misère du peuple. Il vivait dans la paille. Maintenant je sais : avec Lula tout était mieux. Les sœurs de l´église catholique aussi ont apporté leur aide.
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Je prie ans cesse pour que tu sortes et je vais encore voter pour toi. C´est sous ton gouvernement que j´ai pu prendre ma retraite et aussi que j´ai reçu le Bolsa Família. Avant cela, je n´arrivais pas vraiment à manger. C´est pourquoi je prie pour toi tous les jours. J´ai 70 ans.
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Je suis [nom caché], j´ai 77 ans mais je ne t´oublie pas. Quand je vois [ce qu´on dit de toi à] la télévision, cela me fait mal, mais je ne peux que prier. J´ai quatre enfants et cinq petits-enfants et ils voteront pour toi, autant de fois qu´il le faudra. Des gens de ma famille élèvent leurs enfants grâce au Bolsa Família. Si Dieu le veut, je vais [un jour] entendre à la télévision : « Lula est libéré ». Si Dieu le veut.
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Tu as toujours été une bonne personne, tu as été la personne qui a fait disparaitre la faim. Durant ton mandat, personne n´a souffert de la faim. L´éducation s´est améliorée, les personnes âgées sont devenues prioritaires et elles ont appris au moins à écrire leur nom. Les femmes n´avaient aucun droit mais elles en ont reçu pendant ton mandat. La dénutrition a chuté au Brésil, la mortalité des nouveaux-nés et les fausses-couches aussi. Même la mort de femmes en couches a diminué car avec les nouveaux droits, tout s´est amélioré. Je te demande de tenir bon, ne flanche pas car notre vie est comme un escalier : elle monte et elle descend et tu auras le dessus.
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Une conclusion provisoire et pleine d´espérance
Notre lutte est la même dans le monde entier contre un système économique qui est en train de éliminer les plus pauvres, la nature et notamment l'éducation publique.
Mais en s'attaquent précisément à l'éducation, Bolsonaro et son ministre se sont attaqués à un point central de l'imaginaire des Brésiliens, même les plus pauvres. L'éducation, et surtout l´éducation supérieure, est à peu près le seul recours pour ceux qui veulent sortir de la pauvreté. Depuis les réformes mises en place par Lula et Dilma, il ne s'agissait plus d'un mirage mais d'une réelle possibilité.
Et la réaction aux mesures brutales de Bolsonaro contre l'éducation est venue : le 15 mai dernier, d´énormes manifestations ont réuni plusieurs millions de Brésiliens dans tout le pays. J'ai participé à celle de Rio qui a réuni entre 250 000 et 300 000 manifestants, et que Bolsonaro a traité « d´idiots utiles manœuvrés par la gauchaille ».
Anne-Marie Milon Oliveira