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Pour que le métier d'enseignant ne soit pas ce "métier impossible".

Dans :  Principes pédagogiques › coopération › 
Octobre 2005

L’été a passé, le temps des bilans, de la respiration physique et psychique, le temps des remises en questions, des perspectives aussi, de la prise de distance et de la réflexion en quelque sorte.
Les regards croisés proposés dans ce numéro arrivent opportunément. On peut les aborder à travers une lecture intensive ou partielle, une approche minutieuse ou flottante. Ils nous aideront,cependant, à tisser des fils,à fixer des liens au moment où commence une nouvelle « aventure » professionnelle.
Tout autant que des regards, ce sont aussi des cheminements qui serpentent, se rencontrent, se mêlent aussi parfois. En tout état de cause, ils touchent à l’essentiel de ce métier « impossible » qu’est le métier d’enseignant.
Les regards croisés interrogent d’abord ce qui va mal : la souffrance des enfants élèves, la souffrance des enseignants, la limite des échanges et de la mutualisation des pratiques. Les contributions appellent donc à se défaire de nos illusions : quitter une logique de détention du savoir, de toute puissance de notre action éducative ; abandonner aussi l’idée même de maîtrise de la relation enseignant-enseigné quand l’inconscient entre en jeu à notre insu.
Face aux risques, aux périls mêmes, auxquels peuvent entraîner la confrontation aux difficultés, l’acuité des relations avec les enfants,  l’impossibilité d’une neutralité professionnelle, une seule solution s’impose : la réflexion collective ; capitalisation et mutualisation des expériences, analyse des pratiques professionnelles, pensée systémique, démarche clinique, tout cela n’est pas qu’un catéchisme : l’ensemble de ces outils et méthodes d’analyse et de travail concourent à privilégier le recours au collectif.Certes pas à des collectifs de pure forme comme ceux des textes officiels mais à de vrais cadres d’échanges où la difficulté et le doute peuvent se dire, la satisfaction narcissique s’exprimer, où l’intégrité professionnelle et personnelle de chacun est scrupuleusement respectée.
La croisée des regards se focalise sur la formation,pas seulement sur une demande de plus de formation mais sur la prise en compte à la fois de la réflexivité nécessaire à l’exercice du métier d’enseignant… ou de formateur.
Ces contributions appellent aussi à réfléchir sur la pédagogie Freinet et la manière dont chacun s’y inscrit, s’en empare, s’en réclame. On peut se demander comme Yves Fradin dans ce dossier, s’il « existe autant de pédagogies Freinet que d’enseignants qui s’y reconnaissent » ou si il existe un socle théorico - pratique suffisant pour faire de la pédagogie Freinet un paradigme pédagogique singulier. Les enseignants Freinet sont-ils des pratiquants,des praticiens ou des praticiens réflexifs pour reprendre les formulations de Patrick Robo ? Comment promouvoir une pédagogie de l’expression, de la communication, du travail et de la coopération ?
Si l’on s’interroge sur ces questions, la croisée des regards est encore une fois nécessaire. D’abord il faut dénouer les fils de la grande illusion de notre idéal pédagogique ; trouver ensuite des appuis, des supports, des cheminements, des encouragements qui permettent d’avancer en conservant une haute idée du métier d’enseignant tout en en acceptant les périls, qu’ils soient d’ordre institutionnel ou personnel. Enfin, garder en tête pour nous-mêmes cette idée majeure que « c’est à plusieurs qu’on apprend tout seul ».

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