Explosion de couleurs
Après le confinement, dans ma classe unique urbaine à Marseille, je décide de laisser aux enfants, l’après-midi, un temps pour explorer, lire, peindre, faire des ateliers libres etc.
Jusqu’à maintenant, les enfants étaient plutôt studieux et scolaires : ils travaillaient sur leurs enquêtes, les lettres des correspondants, voire sur leur plan de travail. D’autres codaient pour créer des jeux vidéos, en rapport avec notre projet BTj ou jouaient à des "jeux sérieux" (Mathéros® par exemple) sur les tablettes.
Pendant la réunion coopérative, je fais remarquer qu’il est dommage de ne pas investir le coin peinture. Certains élèves connaissent l’organisation de ces temps d’art libre et ont déjà produit des œuvres qui ont été exposées au congrès d’Angers, mais en ce début d’année, ça n’a pas vraiment de succès.
|
 |
 |
L’année dernière, j’ai acheté du "drawing gum". Faute de formation, je découvre les techniques et je dois les expérimenter moi-même pour savoir en quoi elles consistent. J’ai choisi de toujours faire ces expérimentations en classe, pendant les ateliers libres : donc, régulièrement, je suis en train de peindre, de graver, de tester des ateliers à mon bureau, pendant que les enfants vaquent à leurs occupations. J’appelle ça la "technique Parmentier", qui avait mis des gardes devant les plants de pomme de terre pour populariser le tubercule…
Ça ne rate jamais : les enfants me posent des questions, auxquelles je ne peux pas toujours répondre. Donc, souvent, on se retrouve à tâtonner à deux ou trois avec ce nouveau médium que nous rangeons ensemble à la fin de l’atelier.
|
 |
C’est lors de ce test du "drawing gum" que je sors les bouteilles d’encre. En classe, tout ce qui est à hauteur des élèves a vocation à être utilisé, tant que c’est nettoyé et rangé ensuite.
Après ce test, ça démarre : pendant plusieurs jours, les élèves (au départ, seulement les CM) se saisissent des bouteilles.
|
 |
Dans la classe, il y a des petits rectangles en plastique pour protéger les bureaux, des éponges pour nettoyer, et ceux qui "auront de la vaisselle" doivent ranger environ dix minutes avant les autres ateliers. C’est une organisation qui a été décidée au fil du temps.
Au départ, on teste donc ensemble les encres : on observe ce que ça donne quand on en met trop, ou pas assez, quand on la dilue. Beaucoup de papier et d’encre sont utilisés. Mais pour moi, il est important que l’enfant puisse essayer pour anticiper le résultat de sa production.
Comme un musicien fait ses gammes, l’enfant doit faire ses essais, en fonction du geste, de la qualité du support, de la quantité d’encre, et adapter tout ça suivant le résultat espéré. Et je crois qu’on ne peut parler de démarche artistique que si le résultat obtenu est en adéquation avec l’intention de départ, ce qui sous-entend que chacun a fait assez d’essais, d’erreurs, pour savoir ce que chaque geste va produire sur le papier. En art, je pense que le tâtonnement expérimental produit beaucoup de "râtés".
|
|


|