En classe, on peut coopérer de multiples façons. Même l'école traditionnelle semble attirée par la coopération, sous la forme du tutorat et de l'entraide. Cette pratique n'est pas nouvelle : Socrate et Comemius peuvent être considérés comme les pères du tutorat. Ils explicitent longuement leurs idées à ce propos. Ce qu'ils en disent ne s'applique plus dès que la scolarisation est prise en charge par des institutions et un personnel devenu jaloux de ses privilèges. Mais cela revient sur le devant de la scène lorsque des conditions de l'enseignement se transforment avec un nombre croissant d'élèves : l'enseignement mutuel au XIXe siècle a pu résoudre cette question d'effectifs mais a été rapidement abandonné.
Souvent, les enseignants et les enseignantes qui introduisent ou facilitent la coopération dans leur classe le font d'abord dans des domaines où il leur semble qu'il y a moins d'enjeux portés par les exigences scolaires classiques. Par exemple, ils laisseront les élèves prendre des initiatives et s'organiser dans des situations de la vie quotidienne (mettre de l'ordre, préparer une fête...) mais seront plus prudents ou se sentiront moins compétents quand il s'agira d'apprendre la grammaire ou la littérature et lors des apprentissages mathématiques et scientifiques. Lorsqu'il est question de " coopérer pour apprendre", il semble y avoir une réticence : celle de laisser les enfants construire leurs savoirs individuellement et collectivement. Est-ce que l'enseignant craint de perdre une partie de son propre pouvoir en favorisant de telles pratiques entre les élèves ? Dès qu'il ne contrôle plus totalement la situation, se sent-il menacé ?
Le dossier de ce numéro s'attache à montrer la variété des situations d'apprentissage coopératif. La coopération est partie intégrante de la Méthode naturelle : coopérer, c'est participer par choix à un travail commun émancipateur et ressentir la joie d'une meilleure compréhension et d'une plus grande maitrise du monde.
Le comité de rédaction