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Les Chats amoureux

Dans :  Principes pédagogiques › 

 

 

CréAtions "Témoignages en liberté"

Kathleen Carton, 5 ans, Gattières (Alpes maritimes) - Écrit avec l'aide de sa Mamie Annie Carton

 


Les chats amoureux

 

Le point de départ

Le mur d’une chambre entièrement recouvert d’un papier peint «poster» collé par Aloys, le papy de Kathleen, cinq  ans, il y a bien longtemps. Il représente un village mais est défraîchi et un peu taché. J’avais vaguement pensé proposer un jour à Kathleen de cacher les taches par une petite fleur… (je manquais d’ambition !)

Ce poster, elle l’a vu depuis sa naissance et il a souvent été prétexte à imaginer des histoires dans ce village.

Son papy Aloys, décédé lorsqu’elle avait trois ans, est toujours présent dans son souvenir que nous entretenons d’une façon sereine et gaie : un papy tendre, taquin, joueur, blagueur.

 

À l'occasion de ses cinq  ans, je suggère à Kathleen de faire comme les artistes qui peignent, non pas sur des feuilles mais sur des murs et celui-ci a besoin d’être rénové. Elle est passionnée par les livres de toutes sortes, y compris les livres d’art.

Sur des gravures rupestres des hommes préhistoriques,nous remarquons qu’ils adaptaient leurs dessins au support.

Nous regardons aussi des fresques de la Renaissance italienne et des œuvres murales de Picasso, Matisse, F. Léger. 

Je photographie et imprime le poster en lui disant que les artistes, avant de se lancer, font des croquis préparatoires. Ce qu’elle fait mais ne s’en servira pas du tout après !

 

La réalisation

Elle s’installe d’abord  sur le lit, face au poster, et le regarde longuement, en silence.
Je fais de même.

 

Je ne lui donne qu’un feutre noir car j’ai peur qu’elle barbouille tout de toutes les couleurs jusqu’à rendre l’ensemble illisible… pauvre instit trop prudente !

 

Puis, elle me demande une échelle.

Elle la place, monte tout en haut et trace un grand ovale sur l’endroit vide du ciel, d’un geste ample et sûr. Elle s’applique toujours, particulièrement pour faire les yeux en essayant d’orienter le regard.


"Le soleil, c’est Papy Aloys.
Il a l’œil coquin parce qu’il s’apprête à faire une blague".

  

 

Elle dessine ensuite la girouette puis l’oiseau dans le ciel. "L’oiseau, il veut parler à la girouette mais elle regarde Papy". Chaque fois, elle pousse l'escabeau.

 Le chat sur le toit puis celui sur le chemin : "Ils sont loin alors je fais des cœurs pour les relier parce qu’ils sont amoureux".

 


Elle veut compter les cœurs. Plus tard, elle dira à ses parents : "Il y a 80 cœurs. À la fin, Mamie m’a aidée".

 

 

 

Le nid dans l'arbre : "Ils ont faim. Il faut que le papa et la maman se dépêchent de leur apporter à manger.
Attention ! Un ver chacun !".


"Il faut une plante qui grimpe près de la porte. À côté, c’est Papa… hum… il a les jambes maigres…".

 

De l'autre côté de la porte : "C’est Papichou (son autre papy) quand il était jeune ; il fait un clin d’œil".

 

Je lui conseille de reculer de temps en temps pour juger de l’ensemble.

 

Ce qu’elle fait : " du côté du clocher, c’est vide… je vais faire quelqu’un qui grimpe… Son copain, en bas… il lui tient la corde. Il est émerveillé parce que c’est la première fois qu’il y arrive !". 

 

Il y a un vase posé sur le radiateur.

 

Elle en dessine un autre à côté : "Comme ça, on croit qu’il est posé sur le radiateur".

 

"Hi hi, j’ai fait plein de petites bêtes. Tu les trouves, Mamie ?".

 Besoin d’une pause… "Ooooh… je m’arrête un peu, j’ai mal au bras." On admire tranquillement.

 

Je demande s’il y aura des gens aux fenêtres. "Oh… c’est difficile… on verra pas leurs pieds". 

 

Je lui suggère de mettre des photos. Elle accepte mais me demande de l’aide pour découper.
Elle colle chaque membre de la famille.

 

Au fond, à droite : "Papichou et Mamie Adèle, ils sont petits parce qu’ils sont loin."

Ils habitent loin, effectivement. À noter aussi qu’on avait déjà parlé de perspective dans d’autres contextes.

 

"Autour de ma photo, je fais une guirlande de fleurs ; c’est pour cacher les taches. »

Plus assez de photos. Il faut compléter par des dessins : "c'est Maman, elle tient une fleur..."


"Moi, j'arrive à vélo parce que c'est mon anniversaire. Il faut que je mette un cadeau dans la main de papa. Ah mais, Papichou aussi, il faut lui mettre un cadeau!".

 

"Ouuuuf ! on a bien travaillé !"

 

Assises sur le lit, on contemple. "Ah mais on a oublié derrière la porte… oooh… la prochaine fois…"

 


Le soir, grande impatience en attendant ses parents qui viennent la chercher.

Je dis : "Ils vont en faire une tête… alors qu’on dit toujours aux enfants de ne pas écrire sur les murs !!!"

"Ah oui, on va leur faire la surprise. Je vais pleurer et je vais leur dire : bouuuuh ! Mamie m’a grondée parce que j’ai écrit sur le mur ! ” 

Mais pas assez bonne comédienne, les parents n’y croiront qu’à moitié et seront éberlués.

 

 

La semaine suivante, je l'incite à finir en lui faisant remarquer qu'il y a un coin un peu vide et j'évoque le fait que les artistes reprennent souvent leur travail pour l’améliorer. Elle est d’accord.

 

On reprend l’escabeau.

 

Sur la terrasse en haut de l'escalier : "C’est la princesse qui chante. Le garçon fait attention pour qu’elle ne tombe pas. Il nous fait coucou… Celle qui monte l’escalier, elle tourne le dos. Il faut lui faire les cheveux derrière la tête".


Cela n’aura duré qu’un instant. L’œuvre est terminée. On passe à autre chose.

 

Le titre a été trouvé au cours de la réalisation.

 

 

 

 

 

Témoignages en liberté