Dans tous les efforts que nous faisions pour diffuser notre pédagogie, nous commettions une erreur qui était sur le point de nous être fatale. Et en cela nous oubliions notre propre histoire.
Le titre d’Ecole expérimentale reconnu officiellement à l’Ecole Freinet n’ajoute rien à ses fonctions et à sa destinée, car, par obligation, dès sa création, l’Ecole de Vence a été une école expérimentale de première zone, pourrait-on dire.
Les éducateurs qui acceptent aujourd’hui de s’essayer à la rénovation de leur enseignement feraient bien de relire Claude Bernard et de méditer sur la méthode scientifique qu’il recommande. Car, dans aucune corporation peut-être, on n'en est aussi éloigné que dans l'enseignement. Et dans aucune autre, sans doute, on ne s'en croit si près!
Qu'est-ce que cette école — dites-vous peut-être— où les enfants n'ont pas un chargement de livres à traîner, où ils n'étudient plus de résumés, ne s'ennuient plus sur ces mêmes devoirs qui vous ont tellement excédés quand vous étiez écoliers ?
On nous amène souvent en classe des enfants en apparence exceptionnellement doués qui, sortis de milieux aisés, se situent d'emblée au niveau des adultes : leurs préoccupations, leurs opinions, leurs projets les placent au- dessus du niveau des enfants de leur âge vivant dans les contingences limitatives de la vie prolétarienne.
...L'enfant a besoin de connaître, de savoir; il questionne sans cesse sur l’ordonnance et les mystères de la nature, et aussi sur les merveilles étonnantes de la machine et de la science. Ce désir participe de sa permanente soif de puissance et de conquête. L’enfant recherche la connaissance comme l'abeille le nectar, mais les matériaux de cette connaissance ne doivent pas rester nectar ; ils doivent passer automatiquement au service de la construction intime qui les transformera en miel.