L'archéologie industrielle : un terrain d'aventures scientifiques et techniques, historiques et esthétiques !
À mesure que des pans des industries passée disparaissent, émerge la notion d'Archéologie… de l'industrie.
Étudier et valoriser notre patrimoine industriel : pour quoi faire ?
C'est d'abord un irremplaçable instrument d'initiation à l'histoire de l'industrialisation et plus généralement à l'histoire technique, économique et sociale, en milieu scolaire et universitaire. C'est aussi un moyen de diffuser, dans l'ensemble des publics, la culture scientifique, technique et industrielle (on voit bien que le public ne s'y trompe pas, durant les Journées du Patrimoine en septembre)
Le champ des découvertes est énorme, car les industries ont beaucoup évolué, laissant quantité de friches.
Ici, une ancienne tuilerie-briquetterie, là, des cheminées, carrées ou ronde.s Ce concasseur oublié, est-ce seulement de la ferraille ?
L'archéologie industrielle invite aussi à regarder les matériaux et les formes : aujourd'hui, tel chevalement d’un puits surmontant comme un symbole le musée de la mine, peut s'apercevoir à des kilomètres à la ronde, telle une sculpture-signal.
Des artistes même entrent dans les ateliers désertés pour puiser, comme des archéologues, dans les vestiges oubliés. Ils y trouvent des engrenages, des pistons ou des outils, des matériaux et des formes multiples que leur imagination, leur démarche artistique et leur savoir- faire transformeront en œuvres.
L'archéologie industrielle sauvegarde aussi la mémoire de vestiges plus récents, comme le radôme (radar sous un dôme) de Pleumeur-Bodou (Côtes-d'Armor) qui permit en 1962 la première liaison France-États-Unis par satellite.
Elle s'interroge aussi pour demain. Que deviendront les immenses sites industriels d'exploitation, de stockage et de transformation pétroliers ? Et n'oublions pas les centrales nucléaires !
Une ancienne carrière de pierre du XVIIIe siècle à Glay, en Beaujolais : mise en valeur des outils devant le front de taille |
Dans les années 1850, la Savoie appartenait encore au royaume de Piémont-Sardaigne, qui fit construire une voie ferrée de Chambéry vers l'Italie. Ce pont métallique, construit par des ingénieurs anglais, permettait aux trains de traverser l'Isère. | ||
Roue d'un moulin à huile encore en activité, à Chanaz (Ain) | L'usine qui traitait les minerais de la Vallée de la Sesia (Piémont italien) a laissé place à un camping : seuls restent la cheminée, la maison de maîtres, et les piliers d'entrée ornés de plaques de fonte parlantes | Quel avenir pour les belles tours de refroidissement de la Centrale nucléaire du Bugey ? |
Canevas pour guider le travail de recherche sur un site d'archéologie industrielle
Elle est tout de même assez diversifiée pour laisser deviner l'étendue des secteurs géographiques, historiques et techniques dans lesquels l'archéologie industrielle est présente.
Rappelons quelques généralités en commençant par la géographie. Hier plus qu'aujourd'hui, le choix d'un emplacement pour installer une activité industrielle dépendait beaucoup de la géographie. Dans le cas d'une exploitation minière, la nature du sol ou du sous-sol, donc la géologie, reste encore aujourd'hui déterminante. Ensuite, le relief devait être soit favorable, soit surmonté et aménagé pour permettre l'installation des bâtiments d'exploitation et éventuellement de transformation (forges, fours à chaux). D'une manière générale, l'homme ne pouvant survivre partout, les données géoclimatiques ont joué un rôle essentiel dans le développement, ou l'absence, de l'industrie, dans telle ou telle partie du monde.
L'autre point indispensable sera l'accès et la facilité de circulation pour le transport et la commercialisation. Par voie de terre, de fer ou par voie d'eau (aujourd'hui aussi par les airs), les hommes comme les marchandises doivent circuler dans une société industrialisée. Ainsi, avec la géographie, ce sont les données de la nature et de l'environnement qui permirent ou non l'installation d'entreprises. Ces atouts ne sont pourtant rien sans l'énergie. D'abord humaine et animale, elle est devenue hydraulique ou éolienne. Puis la vapeur et la houille blanche (électricité) ont permis de surmonter les obstacles géographiques. Un barrage comme une centrale thermique ou nucléaire pouvant l'envoyer dans les endroits les plus reculés, l'entreprise n'est plus sur le lieu même de la source d'énergie, comme c'était le cas avec l'énergie hydraulique pour les moulins à eau.
Après les contraintes naturelles, l'initiative industrielle doit affronter les contraintes humaines. Sa finalité étant la production de richesses, aucune ne peut se passer du volet économique. Nous voici donc dans la gestion, avec l'archéologie industrielle. La plus-value se trouvant dans la valeur ajoutée entre le produit brut et le produit transformé par le savoir-faire des ouvriers ou la technologie des ingénieurs, l'histoire des sciences et des techniques nous rejoint. Le tout se faisant derrière les murs et sous les verrières des fabriques ou des manufactures, nous voici dans l'architecture qui constitue une bonne partie, et la plus visible, du patrimoine industriel. Rien ne pouvant se faire dans ce domaine sans les hommes, et en principe ne devant se faire contre eux, c'est la dimension sociale du travail qui trouve sa place. En son nom, des règles seront établies et des luttes auront lieu pour les faire respecter. Ce sera l'histoire sociale du monde du travail. Au fil du temps, des modifications vont intervenir dans l'entreprise. Un jour peut-être elle fermera. La mémoire collective va s'approprier ce passé devenu bien culturel commun, s'ajoutant à l'histoire du lieu.
Les vestiges parleront… avant démolition ou reconversion. Les derniers témoins aussi. Il y aura des archives à étudier, des illustrations à rechercher, des photographies à faire si l'usine ne s'en est pas chargée, ce qui est bien souvent le cas pour les PME .
Chacun des secteurs énoncés occupe une place dans la démarche de l'archéologue industriel. Sous une forme pratique les voici présentés. Celui qui désire engager une recherche concrète peut soit les relever sous cette forme, soit les adapter à sa façon pour obtenir un canevas qui guidera son travail.
Nous proposons quelques fiches.
La première attitude étant la curiosité, le désir de savoir et de comprendre :
- la première démarche si cela est possible sera de visiter le site (géographie).
- Prenez alors le temps de le décoder (histoire).
- Relevez d'abord les indices les plus évidents (technologie).
- Cherchez-en la fonction ou la signification, observez les matériaux, questionnez les riverains, photographiez, apprenez l'histoire locale, consultez les archives.
Et peu à peu sortez de l'oubli, parfois volontaire, pour une ou deux générations, ce qui eut un rôle, un sens, une fonction à un moment donné, et qui peut en avoir d'autres aujourd'hui.
Canevas en dix rubriques… géographie, histoire, économie, technologie, architecture, social, culturel, documentation écrite, documentation visuelle, divers. |
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GEOGRAPHIE 1. Situation, implantation, environnement,végétation 2.Géologie, hydrographie, gisement 3. Surface, espace, mesures 4. Circulation (accès), route,chemin de fer, canal |
ECONOMIE 1. Contexte économique 2. Investissement(s) 3. Gestion, administration 4. Marché, distribution |
ARCHITECTURE 1. Matériaux, contraintes 2. Formes, volumes 3. Fonctions 4. Production, stockage |
CULTUREL 1. Vestiges (état des) 2. Intérêt historique et pédagogique 3. Projets (réhabilitation ou démolition ?) 4. Budget |
DOCUMENTATION VISUELLE 1. Plan(s), cartes 2. Dessins, peintures, gravures, photos... 3. Témoignages (audio, vidéo...) 4. A faire sur place |
HISTOIRE 1. Dates 2. Contexte (politique) 3. Fondateur(s) 4. Entreprise |
TECHNOLOGIE 1. Énergie 2. Savoir-faire 3. Mécanisation 4. Modernisation |
SOCIAL 1. Effectif, formation 2. Organisation, hiérarchisation 3. Satisfaction 4. Revendications |
DOCUMENTATION ÉCRITE 1. Témoignages 2. Archives 3. Publications 4. Reportages, presse |
DIVERS 1. 2. 3. 4. … |