Raccourci vers le contenu principal de la page

Sociologie de la lecture

Janvier 1989

Les enquêtes sociologiques sur la lecture, souvent hétérogènes dans leurs procédures, ne sont pas d'un maniement aisé et il faut se garder d'en forcer l'interprétation. Il en ressort cependant quelques résultats d'ensemble convergents et donc globalement vrais.

Lecteurs et non-lecteurs
Environ 75 % des Français âgés de plus de quinze ans possèdent chez eux des livres et en lisent donc au moins occasionnellement. Un quart de la population, en revanche, n'a jamais recours au livre (ni d'ailleurs à un journal).
Un quart des Français sont de petits lecteurs, c'est-à-dire qu'ils lisent un peu moins d'un livre par mois.
Un autre quart sont des moyens lecteurs, lisant de un à deux livres par mois, et qui possèdent chez eux au moins une centaine d'ouvrages. Le dernier quart est constitué par les forts lecteurs (qui lisent au moins deux livres par mois), dont une moitié de « gros » lecteurs, qui lisent au moins un livre par semaine.
Depuis 30 ans, le pourcentage des non-lecteurs diminue régulièrement mais lentement. Celui des forts lecteurs, en revanche, semble plutôt stable ; les vrais progrès de la lecture se rencontrent plutôt dans tes deux groupes intermédiaires des petits et moyens lecteurs.
Les principales variables sociologiques de la lecture (qui sont d'ailleurs cumulatives) sont les suivantes :
- l'âge : on lit plus de quinze à quarante ans (et surtout de 15 à 24 ans, période des études) qu'après quarante ans : contrairement à ce que certains croient, les taux de lecture sont particulièrement faibles chez les retraités.
- l'urbanisation : la fréquence de la lecture croit avec la taille de l'agglomération de résidence et est donc la plus forte à Paris.
- le degré d'instruction et le milieu socio-professionnel : la lecture est évidemment très fortement corrélée avec !e niveau des études effectuées et on la trouve donc plus répandue chez les diplômés de l'enseignement supérieur et la population générale des cadres.
La forte lecture se rencontre surtout chez des personnes jeunes, de niveau universitaire, habitant une grande ville ou l'agglomération parisienne et exerçant une profession intellectuelle ou de cadre supérieur.

Depuis 30 ans, le pourcentage des non-lecteurs diminue régulièrement.

VITESSES DE LECTURE
Pendant toute L'Antiquité, l'écriture ne: séparait pas les mots, ce qui obligeait le lecteur à articuler oralement les syllabes qu'il lisait pour identifier phonétiquement les différents mots: la lecture était donc lente, même si certains lettrés atteignaient une lecture presque silencieuse. La séparation,-des mots dans l'écriture sera introduite progressivement à partir. du VIII° siècle, et la lecture silencieuse, se, répandra avec elle tout au long du .Moyen Age., Mais il existe toujours de grandes disparités dans la vitesse de lecture, même silencieuse : .
- un lecteur moyen lit environ 300 mots à la minute ;
-- un lecteur confirme en lit 600 ;
- les « virtuoses " lisent, près de 000 mots à, la minute.

LA NOTION DE LECTURE
Le terme de lecture recouvre une grande variété, d'utilisation de l’écrit imprimé, difficile à -appréhender dans les enquêtes. On entend le plus souvent par lecture d'un livre le fait de le commencer à la. première page et d'aller jusqu'au bout (du moins quand I'œuvre. en vaut la peine), ce qu'on pourrait appeler la lecture «littéraire».
Mais il s'en faut que ce soit-le seul type de lecture possible : il suffit de penser aux lectures- de « consultation», pour lesquelles tant d'ouvrages sont écrits : dictionnaires d'abord, mais aussi quantité d'ouvrages de savoir, du livre pratique à la thèse. De la lecture d'une notice à celle d'un chapitre ou davantage, les variables de la « consultation " sont innombrables et une part très importante de la production éditoriale moderne s'est développée pour la satisfaire. -
 

Extrait de French Cancan n°1

Revue du secteur de français de l'ICEM

16 numéros parus de 1988 à 2000