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Non, notre mouvement n'est pas fait uniquement de références au passé. Il est aussi, comme il a toujours été, travail quotidien, ajustement incessant
à la réalité du moment: la société d'aujourd'hui, les enfants d'aujourd'hui, l'urbanisation, les mass-média, notre idéalisme, notre volonté de travailler sur du solide, notre référence constante à l'enfant et à ses productions.
Tous facteurs plus ou moins contradictoires et entre lesquels il nous faut bien chaque jour déterminer un compromis - toujours changeant, toujours remis en question. Et pour notre équilibre personnel, pour celui des enfants, il faut bien que ce compromis soit le plus solide et le plus
conscient possible.

L'article de Jean-Yves Fournier (Educateur du 15 novembre 1971) me paraît excellent à plus d'un titre. Tout d'abord nous sortons de l'auto-satisfaction
un peu naïve et fortement mystifiante des contributions où l'on raconte une expérience qui a réussi.
Elle oblige ensuite à amorcer le dialogue dans le cadre même de la revue. C'est-à-dire qu'elle nous oblige à préciser ce qu'on entend par expression
libre. En ces temps où, Freinet disparu, on peut faire à tout propos et hors de propos allusion aux vertus de l'expression libre, le texte de J.Y. Fournier fait l'effet d'un pavé dans la mare ... Et c'est très bien ainsi.

Je regarde les enfants grimper sur les rochers. J'observe et je pense.
Il y a l'adroit qui saute de rocher en rocher, qui fait des cabrioles, qui se sent à l'aise tout là-haut. Il peut parler d'autre chose, presque sans regarder
ce qu'il fait.
Il y a celui qui monte tout doucement, regarde ses pieds, étend ses bras pour rétablir un équilibre précaire.
Il y a celui qui peut plus qu'il n'ose: on lui a tellement défendu! Il réclame l'assentiment de l'adulte pour chacune des prouesses.
...

Il ne s'agit pas ici de correspondance inter-scolaire comme on l'entend habituellement en Pédagogie Freinet, c'est-à-dire: échanges de travaux scolaires et correspondance individuelle entre élèves de deux classes de régions plus ou moins éloignées, mais de rencontres amicales, de discussions et exposés des préoccupations communes, de sorties et activités péri-scolaires.

A   la   suite   des   Journées   de   Vence, Bertrand  m'écrivait  à  propos  du chantier  créativité:  "Un  séminaire  délirant, construit,  un  approfondissement  à donner le    vertige.   Et   oui,   un   vrai   vertige.
Verrons-nous   jamais   le    bout   de    ces énormes    travaux?   En   lirons-nous   le dixième?  Et  surtout  partir  sans  autre référence   que   notre   travail  quotidien ...
c'est  audacieux  et  original.  Le  pari  est gros  ».